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C'est Peu Dire

  • : Les Restes du Banquet
  • : LA PHRASE DU JOUR. Une "minime" quotidienne, modestement absurde, délibérément aléatoire, conceptuellement festive. Depuis octobre 2007
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Et Moi

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Un Reste À Retrouver

26 novembre 2018 1 26 /11 /novembre /2018 03:53

La preuve, irréfutablement, que l’intelligence de l’homme est loin d’être supérieure à celle des autres animaux est qu’il utilise son intelligence, incontestablement supérieure à celle de tous les autres animaux, à très mauvais escient.

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25 novembre 2018 7 25 /11 /novembre /2018 03:05

– Fin 1992 –

 

Nous étions alors fin 1992, après un passage à vide – appelons ça ainsi – je m’étais remis au travail et le livre avançait bien ; j’avais eu raison de me séparer du dossier jaune que Nora m’avait confié. Évidemment, je n’avais toujours aucune nouvelle d’elle, j’aurais donc à me passer du cahier noir, qu’il ait existé ou pas.

Un soir, en novembre je crois, après une promenade aux Tuileries (on m’avait conseillé d’éviter désormais le jardin du Carrousel et autres lieux « chargés d’histoire », enfin, chargés de la petite histoire, ma petite histoire), j’étais remonté jusqu’à la place de la Concorde puis j’avais pris l’allée Marcel Proust. Je voulais jouer les touristes et aller caresser, moi aussi, les fesses des sculptures monumentales de Botero installées sur les Champs-Élysées. Bien sûr, ces Colombiennes de bronze, froides et lisses, ne pouvaient rivaliser avec notre Dina callipyge (jamais Nora n’aurait trahi Maillol) ; je les trouvais néanmoins séduisantes et attendrissantes (j’aurais quand même aimé avoir son avis). J’avais ensuite poussé jusqu’au Gaumont-Ambassade pour voir Les Nuits fauves de Cyril Collard. Romane Bohringer était très belle (elle avait la même silhouette que Nora, elle était instinctive et habitée comme elle – l’hystérie en plus).

Nora recommençait à se faire très présente, j’avais beau éviter le Carrousel ou le Vert-Galant, ne plus lire Gary, ne plus écouter Queen ou Renaud, elle revenait se glisser dans chacune de mes pensées, malgré des parcours inhabituels, elle me retrouvait toujours en chemin ; elle ne cessait d’ouvrir des parenthèses qui trouaient mon texte de plus en plus obstinément. Elle me manquait. Nora me manquait et j’avais besoin de voir son prénom écrit.

Pourquoi lui avais-je dit, la dernière fois chez Angelina, qu’on ne faisait pas demi-tour dans la vie. Encore une phrase creuse de philosophe débile. Quel vaniteux crétin je faisais ! Quelque part dans le texte sur le voyage de noces à trois, Louis-Gonzague, l’ami du comte, dit à Yvonne qu’elle a une saison d’avance sur les autres, moi, j’en ai toujours deux de retard. Résultat : j’avais laissé filer la femme de ma vie. Minable et pathétique.

Bon, mais s’il était encore temps ? Encore temps de faire demi-tour. Et si pour une fois, j’osais, si je voulais et décidais plutôt que de laisser le destin choisir à ma place pour ensuite me lamenter ? Ça faisait un peu plus d’un an que j’enquêtais sur le passé d’Odette, je pouvais peut-être me consacrer à la recherche de Nora.

Je partais donc avec l’idée de retrouver Nora. Retrouver Nora. (J’aimais ce prénom, court et lumineux – évidemment je ne lui avais jamais dit – il était concentré dans quatre petites lettres et ouvert pourtant à l’infini, ouvert sur le nord, bien sûr, mais sur le sud aussi par son origine arabe). Nora. Je devais bien concéder piteusement que si je ne l’avais pas retrouvée plus tôt, c’est parce que je ne l’avais pas cherchée. Gros nigaud, abruti, molasse ; j’étais un cancre en amour. Nora. (Je me rappelle maintenant l’avoir entendue dire une fois, je n’y avais alors pas porté attention, « c’est curieux ce prénom qui commence par dire non, ça ne me ressemble pas »). Ce n’est pas parce que l’on est rêveur que l’on doit être paresseux. Cesse d’attendre et espérer, vieil imbécile, agis !

Requinqué et excité, je me lançais donc sur les traces de Nora. Mon enthousiasme renaissant allait vite s’essouffler. Je réalisais que je n’avais ni adresse ni téléphone.

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24 novembre 2018 6 24 /11 /novembre /2018 03:28

Hier, c'était vendredi, jour de consumation noire ; aujourd'hui, je me permets de recycler un ancien reste, un peu usé mais toujours présentable.

« Je souhaite un très joyeux samedi azur aux rêveurs solidaires, un dimanche bouton d'or aux bucoliques bohèmes, un lundi blanc cassé aux frugalistes délicats, un mardi bleu électrique aux dynamiques inoffensifs, un mercredi framboise aux gourmands enchantés, un jeudi bleu Klein aux artistes du cru, un samedi cuisse de nymphe aux amoureux buissonniers et encore un dimanche flamboyant aux îliens du sud.

Je laisse le vendredi à Robinson et le noir à Soulages. »

(25 novembre 2017, reprisé à la main)

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23 novembre 2018 5 23 /11 /novembre /2018 03:31

« Une verticale n’est pas une horizontale redressée ».

[Les guillemets ne sont pas là pour indiquer une citation puisque je dois confesser, en toute humilité, être l’auteur de ce trait fulgurant. Ils sont là pour alerter contre les dangers d’un usage immodéré de ce genre de puissants perturbateurs neuronaux. D’ailleurs, comme les graffeurs travaillent masqués pour se protéger des vapeurs toxiques de leurs œuvres, je me garde bien d’interpréter mes propres pensées.]

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22 novembre 2018 4 22 /11 /novembre /2018 03:52

« … je dois attendre que le sucre fonde », écrivait génialement Bergson, en une vigoureuse synthèse d’Héraclite, Marx et Florent Pagny.

Je m’étonne seulement du début de la phrase : « Si je veux me préparer un verre d’eau sucrée… ». Mais qui, diable, boit de l’eau sucrée ?

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21 novembre 2018 3 21 /11 /novembre /2018 03:13

Indignez-vous ! disait le très sage Stéphane Hessel.

On a juste oublié la moitié du message : … et défendez une grande cause.

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20 novembre 2018 2 20 /11 /novembre /2018 03:40

Non sans une certaine audace, j’ai récemment fait mon coming out ; j’ai avoué : je suis sexagénaire. Bon, je ne l’ai pas toujours été, mais là, c’est incontestable et je ne reviendrai plus en arrière. Eh bien, j’ai été très déçu par les réactions autour de moi, presque tous m’ont dit qu’ils le savaient déjà et que, de toute façon, ça se voyait bien !

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19 novembre 2018 1 19 /11 /novembre /2018 03:35

Réparer, c’est ringard. Il est plus judicieux, plus réjouissant, plus économique même de remplacer par du neuf. Bon, pour la Terre, ça risque de ne pas être simple.

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18 novembre 2018 7 18 /11 /novembre /2018 10:22

Avant de rentrer à Paris, j’avais quand même voulu passer au cimetière de Lons-le-Saunier. Je n’avais évidemment retrouvé aucune trace des cendres dispersées d’Odette, en revanche, j’avais vu, de mes yeux vu, sur une tombe mal entretenue, une plaque difficilement lisible, mais sur laquelle était écrit sans aucun doute ??onne Grandclé?t, ??94-1968. Même prénom, même nom, mêmes dates. Troublant n’est-ce pas ?

Les deux fils du réel et de la fiction s’entrelaçaient vicieusement pour en former un troisième indémêlable.

J’étais encore retourné à Baume-les-Messieurs. Je n’avais retrouvé aucune trace d’Odette, rien à l’état civil, rien au cadastre ; dans le village, très propre et joliment fleuri, j’y avais rencontré surtout de sympathiques Parisiens reconvertis et des touristes hollandais ou allemands ; j’avais interrogé quelques vieux, ils n’avaient aucun souvenir d’une Odette, aucun souvenir d’une mercerie ou d’une cordonnerie. Ici, on peut tout vous dire sur le quotidien des moines au IXe siècle, mais entre 1900 et 1950, c’est le trou noir. J’étais allé au cimetière communal : rien sur Gustave ou Lucienne, rien sur Charles-Marie Bélurier. C’est au moment de partir que j’avais remarqué une tombe au nom de Charles-Marie Nusillard, mort pour la patrie en 1914 ; les dates de naissance et de mort correspondaient à celles de notre Charles-Marie !

Je ne savais plus que croire. Qui avait existé ? Qui avait été romancé ? Qui était un personnage de fiction, et inventé par qui, par Odette ? par Nora ?

Et puis je me ressaisissais, comment douter ? Bien sûr, une certaine Odette, Bélurier ou non, avait existé. Les cassettes l’attestaient. (Enfin, l’avaient attesté, je dois employer le passé, car dans un moment de profonde désillusion, j’avais tout jeté, cassettes, manuscrit, fiches... Je pensais que c’était le seul moyen de terminer le livre et surtout de ne pas réveiller une schizophrénie latente).

Je me souvenais très bien de ces enregistrements, ce n’était pas Nora qui parlait, c’était la voix d’une vieille femme qui s’exprimait avec sincérité et émotion, à l’évidence. Et les autres aussi ont existé, je dois me ressaisir. Allons, comment pouvais-je soupçonner ainsi Nora de m’avoir trompé ? Manifestement, Odette, Yvonne et Séraphin avaient laissé des traces. Et les traces, c’est normal, c’est toujours partiellement effacé, parfois même, c’est à la limite du visible. Le temps travaille ainsi, et c’est heureux ; le présent et le futur ont besoin de place pour être accueillis et c’est l’oubli qui se charge d’en faire. Tout cela était très ancien, il était inévitable que la broderie fût incomplète. J’étais naïf, j’ignorais tout du métier d’historien, je pensais que l’on pouvait ouvrir le livre du passé et y voir se redresser les morts, intacts et souriants, comme dans ces ouvrages pour enfants où à chaque page tournée, par un habile système de pliage, des animaux, des personnages ou des paysages surgissent hors du livre, en trois dimensions. J’avais injustement soupçonné Nora, c’était le temps le coupable, pas elle.

 

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17 novembre 2018 6 17 /11 /novembre /2018 03:12

D’accord, ils broient du noir, les gilets jaunes et certains sont verts de rage ; tout n’est pas rose, il est vrai. Attention néanmoins à ne pas agir comme des bleus en franchissant la ligne rouge, ils pourraient, après s’être fait saigner à blanc, se retrouver marron.

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16 novembre 2018 5 16 /11 /novembre /2018 03:07

Je ne sais si ça peut aider mais demandons-nous quand même qui se souviendra de novembre 2018 en 25 850 ou en 342 876 ?

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15 novembre 2018 4 15 /11 /novembre /2018 03:42

L’homme ou l’impatience de l’évolution.

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14 novembre 2018 3 14 /11 /novembre /2018 03:26

C’est compliqué la politique car parfois on est pour ceux qui sont contre, mais contre ce pour quoi ils sont pour ; il arrive même que l’on soit contre ceux qui sont pour, tout en étant pour ce contre quoi ils sont.

(Ou peut-être est-ce moi qui ai un goût déviant pour les phrases alambiquées quoique creuses.)

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13 novembre 2018 2 13 /11 /novembre /2018 03:02

Est-ce parce que l’on est gros que l’on est sénateur, parce que l’on est sénateur que l’on est chasseur – je m’y perds – ou parce que l’on est chasseur que l’on est gros ?

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12 novembre 2018 1 12 /11 /novembre /2018 03:00

– Pierre : Ça ne va pas mieux en bas. Pourquoi tu ne les as pas créés parfaits, on aurait été tranquilles ?

– Dieu : Je voulais qu’ils se cherchent, s’inventent et se retrouvent en moi.

– P. : N’importe quoi ! Tu aurais dû faire psycho avant de faire Dieu !

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11 novembre 2018 7 11 /11 /novembre /2018 03:08

L’année suivante, en 1992, j’avais refait un petit voyage d’étude.

J’étais allé à Arlay cette fois. J’avais rencontré le comte Renaud de Laguiche, le propriétaire du château, là où Yvonne et Séraphin se seraient rencontrés, autour du fameux vin jaune si l’on suit le récit émouvant d’Odette. Le comte m’avait reçu très courtoisement. On m’avait fait goûter un délicieux vin de paille, « c’est bon contre la dépression, mais ça ne vous concerne pas manifestement, et ça accompagne à merveille une charlotte au chocolat ou un fondant aux noix ».

Mon histoire semblait beaucoup l’amuser, mais ni lui ni son épouse Anne de Vogüé ne se souvenaient de l’épisode du mariage d’Odette, Yvonne et Séraphin. Anne se rappelait bien que son père, Robert-Jean de Vogüé, comptait parmi ses amis, un artiste excentrique et rebelle qui passait souvent au château et qui ressemblait beaucoup au Louis-Gonzague de mon récit. Mais ce « mariage à trois », pour être sincère, elle n’y croyait pas une seconde. « On en aurait parlé, vous en conviendrez aisément, et cela nous aurait marqués car août 1954, figurez-vous, c’était trois mois avant notre propre mariage en novembre – mariage à deux seulement ! Quant à Yvonne, oui, il y avait bien une femme du village qui s’occupait du linge au château et qui s’appelait Yvonne, je m’en souviens bien, elle était enjouée et avenante, mais qu’elle ait eu une aventure avec mon père ou son ami, permettez-moi d’en douter. Mon père était très bon avec ses domestiques, mais c’était une époque, malgré tout, où l’on ne se mélangeait pas. J’ai le sentiment que votre belle histoire est à moitié vraie, à moitié fausse. » Oui, la comtesse avait raison, et voilà ce qui m’ennuyait, j’aurais préféré que tout fût complètement faux.

J’étais retourné également à Château-Chalon, sur les traces de la grange du Père Jacquot. Pas de grange, mais ça, c’était normal, en revanche j’avais bien retrouvé le magasin ATAC évoqué par Odette, mais cela prouvait-il quoi que ce soit ? Nora aurait pu l’avoir ajouté à son récit. Ah, la « matrice narrative » comme elle disait joliment. J’étais entré dans le magasin espérant être ébloui par je ne sais quelle vision. J’y avais acheté une bouteille de vin jaune et un morceau de comté ; effectivement, j’avais vu des caissières tristes et fatiguées (comme celles du Stoc de La Marjorie à Lons dont parlait Odette), mais cela non plus ne prouvait rien. La matrice n’était décidément pas très féconde.

À Chalon-sur-Saône, j’avais rencontré Louis Chavarol, le neveu de Gustave Lebouillu. Il m’avait confirmé l’existence des distilleries Simon Aîné (qui revenaient plusieurs fois dans le récit d’Odette) et m’avait appris qu’elles avaient fermé en 1959. Il se souvenait très bien que son oncle Gustave possédait, dans les années cinquante, un Solex et une Aronde (ça collait donc avec les souvenirs d’Odette), mais n’avait jamais entendu parler de Séraphin Bonito Oliveira. Gustave avait eu une fille, Monique qui était décédée l’année précédente et un fils Jean-Marie qui était à la maison de retraite du Bois Menuse, « bon, c’est qu’il a plus toute sa tête ». J’oubliais la piste Lebouillu, mais je n’abandonnais pas mes recherches sur les distilleries Simon Aîné.

J’avais pu téléphoner au petit-neveu d’Étienne Simon, monsieur Pelletier. Il m’avait confirmé la date de la faillite des distilleries, confirmé aussi que son grand-oncle avait trois filles Odette, Yvonne et Suzanne, mais n’avait aucun souvenir d’un certain Séraphin, de plus (voilà qui était plus contrariant) il n’avait jamais entendu parler d’un Gustave Lebouillu, censé être le proche collaborateur d’Étienne Simon.

C’est à croire que quelqu’un se moquait de moi. Chaque fois qu’un indice me donnait à penser qu’Odette (ou Nora ?) avait tout inventé, je rencontrais quelqu’un qui me prouvait le contraire et inversement, après chaque preuve incontestable de la véracité du récit d’Odette, je tombais sur un fait qui ruinait mes certitudes. Je me demandais si je devais poursuivre mon enquête ; d’ailleurs, cette quête acharnée du vrai ne me ressemblait pas. J’ai toujours placé le style au-dessus de la vérité.

 

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10 novembre 2018 6 10 /11 /novembre /2018 03:22

Dormir : le moi défait quand le monde se fait.

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9 novembre 2018 5 09 /11 /novembre /2018 03:38

Depuis longtemps mon imagination a pris son indépendance. J’ai beau ouvrir grand les yeux et les oreilles, elle m’invente sans cesse des histoires, toutes plus farfelues les unes que les autres. Pas la peine non plus de lui prouver quoi que ce soit par a + b ; elle a ses raisons, n’est-ce pas, que la raison ne connaît point.

À quelques petits problèmes d’adaptation près, cela me satisfait pleinement.

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8 novembre 2018 4 08 /11 /novembre /2018 03:05

Défaut de transcendance, fin de l’histoire, absence d’idéaux… nous serions en manque. Et si l’on faisait de la vie, oui, simplement la vie, la grande cause universelle pour joyeusement combler ce petit creux.

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7 novembre 2018 3 07 /11 /novembre /2018 03:26

Peut-être est-ce le symptôme d’une maladie dont j’ignore le nom, mais parfois, je me sens moins seul en compagnie de mes lecteurs (que je ne connais pas et qui peut-être même n’existent pas) qu’en sortant dans le monde, frayant avec mes pairs, en chair et en os.

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6 novembre 2018 2 06 /11 /novembre /2018 03:26

Alors bien sûr, l’espérance de vie augmente, mais si l’on a le sentiment de vivre de plus en plus longtemps, c’est aussi et surtout parce que les objets autour de nous durent de moins en moins longtemps.

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5 novembre 2018 1 05 /11 /novembre /2018 03:04

C’est bien regrettable, mais on vit très bien sans réfléchir.

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4 novembre 2018 7 04 /11 /novembre /2018 03:42

À Lons toujours, j’avais trouvé un certain Jean-Denis Livarot, Lédonien de souche, qui m’avait confirmé l’existence du garage des frères Grosjean, avenue Jean Moulin. Ils faisaient de la petite mécanique et de la vulcanisation, jusque dans les années soixante. Ils avaient par ailleurs un magasin de cycles et vendaient des Solex et des Motobécane. Il y avait un vendeur, un vrai clown, qui faisait des démonstrations en ville. « Attendez, oui, il s’appelait Séraphin, c’est ça, oui, oui, Séraphin, les enfants le suivaient dans les rues en criant son nom. Voilà, regardez, c’était à peu près là, si je me souviens bien, juste là, à la place du Spar. » ATAC, Spar, décidément, la grande distribution semblait s’être liguée pour effacer Odette et son monde. Malgré tout, les choses se confirmaient, à tout le moins pour Séraphin.

Évidemment, j’étais allé voir rue des Cordeliers où le trio avait vécu, mais je n’avais pas le numéro. Je demandais si l’on se souvenait de deux femmes qui auraient vécu ensemble, dans les années cinquante. Ma question semblait toujours suspecte alors vous pensez bien que je n’osais parler de ménage à trois. Aucune trace d’Odette, aucune trace d’Yvonne pour le moment.

À mon tour, je me mettais à formuler des hypothèses. Nora aurait bien retrouvé la trace de son grand-père Séraphin, mais Odette aurait inventé leur histoire et imaginé un monde riche en événements, et totalement fictif.

J’étais à la fois un peu déçu (je finissais par les trouver sympathiques tous, Gustave, Berthe, Yvonne et Odette), mais soulagé : l’enjeu n’était plus le même et je me disais que je terminerais plus facilement le livre, un peu comme un jeu – je veux dire comme un roman. Il ne s’agissait plus d’une enquête historique, mais d’une fiction. Je savais faire.

Les mondes imaginaires paraissent toujours profonds, riches et sans limites aux lecteurs, beaucoup moins étriqués et plats que le monde réel. Peut-être est-ce pour cette raison que les fictions plaisent tant. C’est l’inverse pour les écrivains, enfin pour moi ; le réel me semble incroyablement complexe, plein de recoins, de plis, de zones cachées et peuplé d’une foule d’inconnus aux réactions totalement imprévisibles. Comment en parler sans être submergé ; au nom de quoi trier ? Le réel me laisse désemparé et muet, un peu comme un commentateur de football qui serait devant cent écrans de télévision et qui aurait à commenter cent matchs différents en même temps. Au contraire, l’imaginaire est à ma taille : des distances courtes, des événements sommaires, une faible densité humaine, seulement quelques personnages, et à la psychologie prévisible. Bien sûr, j’apprécie quand parfois un personnage se rebiffe un peu et me refuse tel événement ou tel trait de caractère que je voudrais lui imposer ; j’aime quand il m’emmène dans une direction que je n’avais pas prévue. Mais à la fin, rien ne dépasse du cadre de ma page et mon stylo règne en maître dans ce monde à deux petites dimensions.

Perdu dans mes réflexions, j’avais marché dans les rues de Lons-le-Saunier et m’étais retrouvé par hasard rue du Commerce, devant une mercerie. Je n’avais pu m’empêcher d’entrer. J’avais rencontré Juliette Aubry qui tenait le magasin depuis presque cinquante ans, son mari Michel venait de décéder. Je reprenais mon enquête. « Oui, mais bien sûr, j’ai très bien connu Odette ! Et comment, je m’en souviens parfaitement. Elle passait souvent au magasin, elle nous faisait des broderies sur les coussins ou les nappes ; mon Dieu qu’elle était douée ! Ah ça non, je n’en ai pas gardé, vous pensez bien, ça partait tout de suite les broderies d’Odette, vous comprenez, c’était presque des œuvres d’art, ses napperons ; attention, ses coussins brodés, c’était pas fait pour s’asseoir dessus, surtout des popotins comme le mien, saperlipopette ! Et puis, je ne sais plus bien quand, après la mort de sa sœur avec qui elle vivait je crois, peut-être en 1970, peut-être avant, elle a quitté Lons. Je ne l’ai jamais revue. »

Badaboum ! Et voilà que mes hypothèses s’effondraient ! Odette redevenait bien réelle comme Yvonne (sa sœur ou sa cousine). « Comment vous dites, Bélurier ? Non. Odette Grandclément ? Non plus. Ça ne me dit rien ces noms-là. Flûte alors, si Michel était encore là, il aurait pu vous dire, mais moi non. Je crois que je l’appelais toujours simplement Odette. »

Comme par magie, Odette réapparaissait, et ce n’était pas son fantôme, c’était bien Odette en chair et en os, il lui manquait seulement son patronyme. J’avais alors éprouvé les mêmes sentiments qu’auparavant, mais pour des raisons inverses, j’étais déçu car ce livre serait donc autre chose qu’une œuvre de fiction pure, mais j’étais heureux car je retrouvais Odette, Yvonne et Séraphin dans la vraie vie.

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3 novembre 2018 6 03 /11 /novembre /2018 06:35

– Dis donc, qu’est-ce que tu penses du végétarisme ?

– T’inquiète, ce n’est qu’une mode, répondit le lion à la gazelle ?

– Ouf ! Déjà qu’on n’avait plus beaucoup d’herbe.

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2 novembre 2018 5 02 /11 /novembre /2018 03:07

Sois toi-même (si tu es quelqu’un sinon, regarde, apprends, admire, plus tard tu te fabriqueras un moi).

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