Je les observe par la fenêtre ces ombres sales et fatiguées, grotesques et muettes.
Et qu'encombrent-ils encore nos trottoirs, ces fantômes rustiques, vestiges noueux et immobiles ?
Les courbes se répètent. La nature bégaye. Les feuilles mortes meurent.
Et cette désespérante monomanie chromatique !
C'est vert, c’est gris, pitoyablement vert. Gris et périmé.
L'arbre des villes est un lapsus, un délit, une offense, un chancre vil.
Puis je contemple les grues jolies.
Fières et élancées, mobiles et élégantes, elles chatoient et enflamment et animent et inspirent.
Non contentes d’être utiles et généreuses, elles prennent encore le temps d’être belles et spirituelles.
Tout à mon émotion, je m’interroge sur le sexe de ces stèles racées, viriles et délicates à la fois, puissantes et légères pourtant.
Elles sont le père, elles sont la femme, elles sont l'azur et le foyer.
Ô grues !
Peuple de l’espoir, promesse de transcendance, je vous offre, honteux, cette ode modeste, mais c’est une prière de louange que vous méritez !