À courir deux lièvres à la fois on prend des risques, dit-on. Allons, soyons sérieux, les seuls en danger, en l’occurrence, ce sont les lièvres.
À courir deux lièvres à la fois on prend des risques, dit-on. Allons, soyons sérieux, les seuls en danger, en l’occurrence, ce sont les lièvres.
À trop retenir ton passé, c’est le passé qui va te retenir.
Je suis un athée indécrottable. Il y a un truc qui coince néanmoins : il faut accepter que le hasard soit à l’origine de ton visage, tes lèvres si délicates, tes yeux de braise noire, tes oreilles parfaitement ciselées, ton nez, ton sourire et tout le reste. Je suis bien certain que Praxitèle, assisté de Vermeer, n’aurait su faire aussi tendre.
Des couleurs qui se font lumière, tel est le mystère de la peinture ; des mots qui se font sens, tel est celui de l’écriture.
– Arrête de me juger sur mon apparence, tu ne me connais pas, tu ne sais pas qui je suis à l’intérieur, dit Côlon à Grêle.
Certes les routes relient et unissent, mais c’est pour cela justement que l’on voit peu qu’elles sont autant de murs qui séparent, isolent et interdisent.
Alors. Maître Gims change de nom, Booba et Kaaris vont sortir leurs gants de boxe, MHD est toujours en prison et Nick Conrad devant les juges. Bon d’accord, mais on n’a aucune nouvelle de Nekfeu.
On nous cache des choses.
L’ambiguïté, c’est ce jeu dans la pensée qui interdit l’arrêt sur idées.
Greta Thunberg a 16 ans ; elle se soucie de l’avenir.
Et nous, on commémore, on se souvient, on vénère le passé et ses momies moisies et quand nous sommes fatigués de ces hommages aux vieux et aux morts, on mange, on souille et se divertit.
Il est passé à côté de sa vie. Elle a fait semblant de ne pas le reconnaître.
[Vous étiez peut-être vous aussi passés à côté de ce Reste du 15 janvier]
La force finit toujours par échouer, parce qu’elle est seule. Seule et triste. La puissance, c'est autre chose.
Le seul véritable voyage, le seul bain de Jouvence, ce ne serait pas d’aller vers de nouveaux paysages, mais d’avoir d’autres yeux, de voir l’univers avec les yeux d’un autre, de cent autres, de voir les cent univers que chacun d’eux voit, que chacun d’eux est.
Et merde ! Voilà exactement ce que je voulais dire, au mot près, mais c’est du Proust.
Bon, je n’accuse personne, mais je trouve cela tout de même suspect. Au mot près.
Il se trouve que très récemment j’ai entendu Cum on feel the noize du groupe de hard rock Slade (vous vous rappelez peut-être, « Girls rock your boys/We’ll get wild wild wild…). Alors, les souvenirs sont remontés en meute plus de quarante ans après. Cette nuit agitée avec T., le space cake de S., la forte poitrine de B., le coca pour faire passer le whisky, les mitaines en cuir de L. et la moquette des parents d’I. maculée de mon vomi verdâtre.
Bon, la madeleine au thé de Proust avait plus de style, je vous l’accorde, mais beaucoup moins de goût.
Enveloppement personnel.
– Dis, ça va ? Tu as l’air tendu
– J’ai réfléchi, je vais faire mon coming out, répondit Dieu à Pierre, je vais leur avouer que je n’existe pas.
La mémoire a la structure du langage ; nos souvenirs sont toujours des histoires.
– Oh non ! pas vous !
Tenon et mortaise se séparaient.
– Vous alliez si bien ensemble.
On ne sait jamais ce qu’il se passe dans l’intimité.
Allez savoir pourquoi, les enfants ont toujours des âges et demi.
Parfois on est pris par l’urgence et le devoir d’agir face à l'ampleur des dégâts et l’imminence de la catastrophe finale et parfois on se dit qu’il faut surtout ne rien faire (comme quand on joue à cache-cache, dissimulé derrière les rideaux, ne pas parler, ne pas bouger, à peine respirer) tant on détruit, souille, méprise et aggrave la situation dès qu’on fait quelque chose.
Dieu existe-t-il ?
La question me fascine et m’entraîne loin dans le sens et le non-sens. En vain je lis, et cherche et interroge : mais bon sang, qu’est-ce donc qu’exister ?
Zut ! je ne suis pas célèbre, je n’aurai donc pas droit à une biographie. Voilà qui est fort regrettable, quel gain de temps et d’énergie ce serait, il est si difficile de savoir qui l’on est.
Le temps nivelle, grise, lisse et affadit tout. Ce sont les récits qui donnent du relief et du goût à l’histoire.
En réaction au Reste d’hier, un lecteur fidèle et attentif me rappelle ma proposition du 26 janvier 2017 :
Mais alors la vie de qui lisent-ils les people, dans la salle d’attente du médecin ? Et ne croyez pas qu’ils ne sont jamais malades, ils sont comme nous les people.
J’aurais aimé pouvoir confesser qu’il s’agit d’un auto-plagiat piteux, mais c’est malheureusement plus grave, irréversible et lentement contagieux.
Et les people, ils lisent quoi dans la salle d’attente de leur médecin ?
27% de désir, 8% de mélancolie, 22% de bienveillance, 3% de folie, 11% d’inquiétude, 17% de gaité, 9% de malice, 4% d’absence. Telle est la formule exacte (j’ai arrondi à l’unité) du regard parfait. (Celui de Laure, par exemple, qui « dérobe les âmes » comme disait joliment Pétrarque).