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C'est Peu Dire

  • : Les Restes du Banquet
  • : LA PHRASE DU JOUR. Une "minime" quotidienne, modestement absurde, délibérément aléatoire, conceptuellement festive. Depuis octobre 2007
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Et Moi

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  • Philosophe inquiet, poète infidèle, chercheur en écritures. 55° 27' E 20° 53' S

Un Reste À Retrouver

22 mars 2025 6 22 /03 /mars /2025 03:07

Lunule et cuticule : ces mots fabulent, ils ne parlent ni de cul ni de lune. C’est nul. Quant à crépuscule, il cumule, rien sur les crêpes ni le prépuce ni les pustules. C’est ridicule.

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21 mars 2025 5 21 /03 /mars /2025 03:03

Il n’y a plus aujourd’hui aucun débat chez les zoologistes, les girafes n’ont pas inventé le selfie. En revanche, il n’est pas exclu qu’on leur doive la perche à selfie télescopique. Malheureusement, tête en l’air, elles ont oublié de déposer le brevet.

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20 mars 2025 4 20 /03 /mars /2025 03:12

La vérité est contestée, bafouée, humiliée aujourd’hui. Ça complique les choses, mais c’est un retour de bâton pour celle qui a colonisé les corps et les esprits pendant des siècles et s’est imposée sans partage avec arrogance et violence. Pas vrai ?

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19 mars 2025 3 19 /03 /mars /2025 03:35

Les manchots reconnaissent honnêtement ne pas être les inventeurs du selfie, pour autant, rentrant le ventre dans leur smoking, ils attendent avec impatience une livraison de smartphones pour s’adonner collectivement aux joies solitaires de l’égoportrait.

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18 mars 2025 2 18 /03 /mars /2025 03:35

Le séjour à Mexico avait enchanté tout le monde, mais les discussions tendres et passionnantes menées jusque tard dans la nuit les avaient épuisés aussi. Le réveil fut donc difficile et il fallut faire vite pour ne pas rater le bus.

– Es-tu vraiment sûr de vouloir partir, mon Bradovitch d’amour ? Tu peux encore renoncer, tu es si petit. Et Nubecito, es-tu certain qu’il soit toujours là ? S’il te plaît, ne coule pas mon fils unique préféré. Et ne te fais pas kidnapper par des pirates.

– Mam, merci, ça aide bien. Pour les pirates, apparemment, ils ne naviguent plus dans l’Atlantique. Allez, ma petite maman préférée, dans moins de trois semaines, je suis au Havre.

Swann et Nadja les déposèrent à la gare routière ; les séparations ne traînèrent pas. À 8h01, le bus démarrait.

Curieusement, le trajet fut assez silencieux. De ce silence doux et enveloppant qui unissait souvent les deux amis. Nubecito suivait, pensif, et silencieux lui aussi. Brad gribouillait sur son carnet. Ludmilla lisait.

Elle lisait Un amor fuera del tiempo qu’elle avait trouvé à la librairie el Péndulo près de l’Ambassade, une des trois plus belles librairies au monde selon Nadja, qui s’y connaissait.  Carmen Yáñez y retrace sa vie avec Sepúlveda, son ex-mari et mari puisqu’ils avaient divorcé et s’étaient remariés vingt ans plus tard, comme Frida Kahlo et Diego Rivera. L’amour, la littérature, la dictature et la torture sous l’immonde Pinochet, l’exil, la Patagonie, l’amitié, l’engagement politique, la poésie. Et la mort. Sepúlveda est un des premiers à être mort du covid en Espagne. Certains ont vraiment des vies hors norme, pensait-elle. Régulièrement, elle levait les yeux pour lire les panneaux sur le bord de la route, Ecatepec de Morelos, Cautlacingo, Axapusco, Acelotla de Ocampo, elle les prononçait à voix basse, Santa Ana Hueytlanpan, Xicotepec de Juárez, Tlapehualita, elle aimait ces sonorités uniques qui mélangeaient de joyeux sons espagnols et une voix plus ancienne, plus douloureuse peut-être, San Pedro Petlacotla, Papatlarillo, Nuevo Xúchitl. Envoutée par cette mélopée qui semblait interminable, elle s’endormit, la tête sur l’épaule de son compagnon.

– Tu sais que Pap’ mourra en mer, dans sa barque, dit-elle à brûle-pourpoint.

– Quoi ! Tu as fait un cauchemar ?

– Non, pas du tout. Je pensais à Sepúlveda. Sa mort ne colle pas avec sa vie, je trouve. Diego mourra dans sa barque. Je ne t’ai jamais raconté ça ? Un jour, j’avais quinze ans, c’est un peu avant votre retour, il m’a dit qu’il devait me parler. Il avait un air grave que je ne lui connaissais pas. – Je sais que tu vas te mettre en colère, mais je sais aussi qu’après tu comprendras. C’est vrai, ça s’est passé comme ça, je ne sais pas si j’ai compris, mais j’ai accepté. – Un matin, je partirai à la pêche et je ne rentrerai pas, mais ce matin, je ne te le dirai pas. Sur le coup, j’ai trouvé ça d’une violence folle, j’ai éclaté en sanglots, je l’ai insulté, je l’ai traité de monstre et pire encore. C’était la première fois que je me disputais avec lui. Je suis partie et ne lui ai pas parlé pendant deux jours. Ensuite, il a dit encore – Ce matin, je prendrai la petite photo avec moi, alors tu sauras, mais ça arrivera dans très très longtemps. Je me suis effondrée dans ses bras et j’ai eu le câlin le plus tendre jamais reçu. Et puis, on n’en a jamais plus reparlé. Après, on est allés chez Loco le photographe pour un portrait de nous deux comme on faisait de temps en temps. Pap’ m’emmenait chez Loco tous les deux ou trois ans, « quand je changeais de vie », il disait, et on faisait un nouveau portrait. On se tenait bien rigides, bien figés avec un sourire bien forcé, et bien sûr en tenue du dimanche. Et chaque fois, la dernière photo remplaçait la précédente au mur du salon, à côté de la toute première, d’un petit format, prise alors que je devais avoir sept ou huit ans. Cette petite photo n’était jamais remplacée.

– C’est beau mais en même temps, c’est vraiment morbide. Et vous y pensez tout le temps ?

– Pour Pap', je ne sais pas, mais moi, non, je n’y pense presque jamais. Au début, je surveillais toujours la petite photo et j’essayais de deviner dans le regard de Pap’ quelque chose d’anormal et puis très vite, j’ai oublié. Ce qui est sûr, c’est qu’à chaque fois qu’on se retrouve, surtout depuis que je vis à Guadalajara, c’est une explosion d’amour. J’ai toujours essayé de comprendre. Chez nous la mort est très présente. « Gran boca vacía que nada sacia, grande bouche vide que rien ne rassasie », comme dit Octavio Paz quelque part. Il faut la nourrir, la mort, en parler, jouer avec ; on doit s’en moquer ou la fêter, mais toujours lui donner une place de choix dans la vie. Pour vous, les Français ou les Américains, la mort dérange, alors vous la cachez, vous n’en parlez pas, vous faites comme si elle n’existait pas.

– Et Diego dans tout ça ?

– Oui, lui, c’est encore autre chose. Je crois que ça a à voir avec la mer. Elle lui a tellement donné que peut-être il voudrait lui rendre quelque chose. Je ne sais pas. La mer, c’est tellement plus que de l’eau salée pour lui. Tu sais, s’il parle aux vagues, ce n’est pas parce qu’il est fou ou simple d’esprit. C’est qu’il sait quelque chose que les Indiens savaient aussi et que nous avons oublié, et moi la première, c’est le lien qu’on a avec la nature. Enfin, ça paraît tellement nigaud, dit comme ça. En tous les cas, je trouve que cette mort collerait avec sa vie.

– J’avoue. Désolé pour ton dieu Sepúlveda, mais je trouve ça tellement plus fort que de mourir du Covid.

– Le pire, c’est que je sais très bien que le jour où il partira, il ne sera même pas triste. Moi, évidemment... Bon, allez, on parle d’autre chose. Tiens je viens de recevoir un texto de Karolyn. On a rendez-vous au McDo, rue Zapata, une navette nous emmènera jusqu’au bateau. Ça sera plus simple comme ça. Je n’en reviens pas que ce soit déjà le moment de partir. Dans une heure la navette arrive, dans deux heures tu seras à bord, dans trois heures tu seras en mer…

– … et dans quatre, cinq et six, treize, vingt-cinq, quarante-sept heures, je serai encore en mer.

À partir de cet instant, tout passa à une vitesse hallucinante. La gare routière, le McDo, la navette, les au revoir, les embrassades, la passerelle du Françoise-Sagan, Brad qui disparaissait…

– Qu’est-ce qui se passe… comprends pas, no entiendo ni pío, le temps est différent ici ou quoi... what the fuck ! Ça accélère de fou… es una locura… Attends… Brad… Quoi ? Déjà !

Ludmilla perdait pied, ça tapait fort dans sa tête, ça cognait dans son ventre. Sa bouche ne parvenait plus à articuler. Elle voyait Brad s’éloigner sur la passerelle et les mots se télescopaient dans son cerveau.

Dame un appel, cria-t-elle enfin.

– Brad entendit à moitié, oui, bien sûr, quand j’aurai du réseau.

– Non, hurla-t-elle, dame un nombre. Le cœur battant, les jambes tremblantes et les larmes aux yeux, Ludmilla couru vers Brad et bégaya dans un charabia curieux – il faut se donner un appel, comme Swann et Nadja, un otro apellido, nouveau, un nombre nuevo.

Brad comprit qu’il ne comprenait pas.

– Mais qu’est-ce que tu racontes ? Mon nombre ? Tu veux mon numéro ?

– Mais non, je veux un blaze, pas ton 06, tu captes, continua-t-elle, recouvrant sa maîtrise du français un moment perdue. Nouveau nom, nouveau prénom, para complacer el destino, comme dit ta mère. Tu me fais perdre mon français, l’accusa-t-elle en le serrant dans ses bras. Fort.

– OK ! J’ai compris, un nouveau prénom pour remplacer Ludmilla. Bon, mais là, tout de suite, je n’ai pas d’idée…

– Cherche. Vite. Toi, tu seras Nov.

Brad cherchait. En vain. Maria, Louisa, Salma, Ornella… puis il lut sur la coque d’un cargo, Veracruz.

– Vera ? Ça te va ?

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17 mars 2025 1 17 /03 /mars /2025 08:26

Certains affirment que l’invention du selfie revient aux frères Patin. Alors qu’ils voulaient prendre en photo leur voisine Martine Lavelle, ils auraient laissé tomber leur téléphone et déclenché involontairement l’appareil.

(C’est plausible.)

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16 mars 2025 7 16 /03 /mars /2025 03:58

Pourrir, c’est mourir un peu

Moisir, c’est trahir aussi

Partir, c’est choisir encore

Barrir, non, ce n’est pas glapir

Ni clapir, ni glatir

Saillir, c’est gravir, si si

Vieillir, c’est blettir en vrai

Mentir, c’est trahir en mots

Tartir, c’est salir salement

Pâlir, c’est ne pas rôtir

Et sourire ?

Sourire, c’est joli souvent.

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15 mars 2025 6 15 /03 /mars /2025 03:16

Certains affirment que les poneys Shetland ont eu l’idée des selfies bien avant les humains mais qu’ils ont abandonné le projet pourtant bien avancé pour des raisons d’ergonomie.

(J’ai quelques doutes sur cette affirmation qui n’est évidemment accompagnée d’aucune preuve.)

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14 mars 2025 5 14 /03 /mars /2025 03:35

Singulier peut se dire au pluriel et pluriel, au singulier. C’est perturbant et c’est bien comme ça.

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13 mars 2025 4 13 /03 /mars /2025 03:34

Ce sont les humains et non les nasiques qui ont inventé le selfie et c’est une chance parce que certains sont plus photogéniques que d’autres.

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12 mars 2025 3 12 /03 /mars /2025 03:17

– Je me demande combien de pays tu auras traversé. C’est bizarre, moi je ne voyage pas et je me sens vieille, toi au contraire, tu as fait le tour de la planète et je te sens si jeune, si nouveau, voilà, toujours nouveau.

No viaje  pas de voyages / Ya vieja   tu vois mon âge / Pas d’ frontières  pour el gringo / Terre entière  pour el chico. Dis, est-ce que j’ai entendu que tu te sens vieille ou j’ai mal compris, demanda Brad ?

– Je sais, j’exagère comme d’habitude. Ce que je veux dire c’est que je n’ai jamais franchi de frontières géographiques et je sais bien que celle qu’on a « là-haut » est une plaie mal cicatrisée et qui est peut-être en train de se rouvrir. Je n’ai pas ta sagesse, toi, c’est comme si tu transformais le temps en vie et moi, je transforme la mémoire en interrogations.

– Alors là, no capito nada. Tu parles en quelle langue ? Pour moi les frontières, c’est nul, c’est violent, c’est laid, mais toi, tu passes d’une culture à l’autre sans avoir besoin de visa. Exemple, tu passes de la pizza aux tacos sans problème… Pardon, c’est pas drôle ! Tu passes aussi de Shakespeare à Cervantès avec un détour par Victor Hugo. Et pour ça, total respecto !

– C’est vrai, je traverse des frontières culturelles, sociales, linguistiques. Je suis celle qui traduit. J’espère ne pas être celle qui se donne et trahit.

– N’importe quoi ! Ludmalinche est de retour, dit Brad ! Parfois, je me demande d’où tu sors tout ça. Est-ce que tu couches avec des Cortés sanguinaires ? Non. Est-ce que tu fais découvrir ton pays à des touristes souvent incultes qui pensent que tous les Mexicains portent des grands sombreros et font la sieste sous des cactus ? Oui. C’est ça que tu appelles trahir. Moi j’appelle ça instruire, partager et même offrir. Parfois, tu es une énigme pour moi.

– C’est vrai, Brad, encore une fois, c’est toi qui as raison. Nadja, tu te rappelles ce texte d’Octavio Paz sur la femme que tu nous as lu l’année dernière, Los hijos de la Malinche, « La mujer es una figura enigmática. Es el Enigma. Incita y repele. La femme est l’Énigme. Elle attire et repousse. »

– Elle attire et repousse ? C’est tout toi ça. Enfin à moitié… Attends, laisse-moi compter. Comme les Mexicains sont aussi des énigmes pour les Français, en tant que femme mexicaine, tu es une énigme au carré. Donc, si je calcule bien – mais les maths, ce n’est pas ma spécialité – une moitié d’énigme au carré, ça doit faire à peu près une énigme complète.

– Tu as raison, Brad, je complique tout et j’aime comment tu me fais comprendre les choses. En fait, je crois que je suis une énigme pour moi-même. Heureusement que je t’ai. C’est drôle, tous les gens qui nous connaissent pensent que c’est moi qui te guide et qui te régule, tout le monde dit que je te gère, toi le rêveur sans but ni règle. En fait, la vérité c’est que c’est toi qui me rassures, toujours, sur l’essentiel.

– Justement, Mademoiselle Énigma, on est en train de se perdre.

– D’accord, revenons à nos moutons ou plutôt à notre âne. À propos de traduction, j’ai un deuxième cadeau pour accompagner le Travel with a donkey, tiens, c’est sa traduction. J’ai réfléchi, le texte anglais n’est pas si simple.

– J’espère que tu m’as pris la traduction espagnole, Travelo con un ano, tenta malicieusement Brad.

– Ah ah, rigola Ludmilla. D’abord ça serait Viaje con un buro, qui ne veut pas dire « Voyage avec une plaquette de beurre » ; ensuite l’ano, c’est une partie du corps en forme d’anneau, si tu vois ce que je veux dire ; quant à travelo, je préfère ne pas commenter… Bref, je t’ai pris la traduction française, mais tu dois promettre de ne l’utiliser qu’en cas de naufrage linguistique.

– Oui, tu as bien fait, le texte anglais est difficile. Et quelle traduction as-tu choisie, demanda Nadja ?

– J’ai pris celle de Laurent Bury.

– Très bien, c’est la meilleure. La première traduction a été faite par Léon Bocquet juste après l’édition anglaise. C’est écrit dans une très belle langue, parfois un peu désuète, mais c’est un peu ampoulé et surtout très daté. Ce qui est intéressant, c’est que Léon Bocquet a vécu à une époque où les paysages décrits par Stevenson, les objets, les outils, les vêtements existaient encore et les mots pour les dire, aussi. Ce qui en fait un témoignage parfois difficilement lisible aujourd’hui, mais fidèle. On en reparlera en cours, Ludmilla.

– Si je peux donner mon avis, proposa Swann, je suis favorable aux traductions actualisées. Je ne suis pas linguiste et je n’ai pas vos compétences, mais je me pose une question. Est-ce que toutes les époques ne devraient pas « enterrer leur passé linguistique » – je mets des guillemets, il faudrait développer bien sûr – comme les hommes enterrent leurs morts à chaque génération ? Ça ne veut pas dire qu’on les oublie, on peut même leur rendre visite de temps en temps, en parler, mais on reste entre nous, entre vivants. Quant aux frontières, pour revenir en arrière, je serais moins catégorique que toi, Brad. Je crois à leurs vertus. En effet, si elles se transforment en murs ou en paperasseries administratives, là, tu as raison, elles ne valent rien. Mais je crois aussi qu’elles peuvent donner une allure, une tonalité, un style à un peuple. Le jour où la Terre ne sera habitée que par des Terriens, et non plus par des Mexicains, des Américains, des Estoniens, des Lésothiens, des Malgaches, des Ouïgours… – rien que ces mots sont beaux –, eh bien ce jour-là, nous aurons beaucoup perdu. La vie sera monotone et monocorde.

– D’accord avec toi, Dad. Et merci Ludmilla pour le cadeau. Au final, ça fait un livre de plus, je vous préviens, c’est le dernier. On arrête de charger el buro, sinon c’est Françoise Sagan qui va couler sous le poids de mes bagages !

– Mon dieu, s’exclama Nadja, c’est vrai, comme ton havresac semble lourd, tu vas te rompre le dos !

– Quoi ! Mais qu’est-ce qu’ils ont tous avec mon havre sac ?

Je prends de plus en plus de plaisir à les écouter. Si je n’étais pas un nuage, je crois que j’étudierais les langues, et aussi la philosophie. Elles sont intéressantes toutes ces questions, la frontière, la traduction, la femme, la communication… et j’apprécie d’entendre des avis différents pour me forger mon opinion car il faut bien avouer que ces notions sont drôlement abstraites pour nous autres, surtout celle de frontière. J’ai l’impression que je suis souvent d’accord avec Swann qui m’a l’air quand même un peu plus réaliste que les autres. Pour ce qui est du passé et des morts, là, j’ai un doute. Je ne sais toujours pas si pour nous autres nuages, il y a une vie après la pluie, mais quelque chose me fait penser que nous sommes plus anciens que les humains et surtout que chaque personne humaine. Enfin, ce n’est pas encore très clair dans ma « tête ».

Le séjour à Mexico passa très vite et vint le moment de prendre la route pour Altamira. Le bus partait du Terminal Central del Norte à 8h pour une arrivée prévue vers 16h. Ce qui laissait deux heures pour faire le petit kilomètre jusqu’au port. Et embarquer sur le Françoise-Sagan…

 

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11 mars 2025 2 11 /03 /mars /2025 03:19

Tu nais

Tu vis

Tumeur

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10 mars 2025 1 10 /03 /mars /2025 03:03

Je vois d’un très bon œil les recherches sur le voyage vers Mars. J’imagine qu’il envisage d’aller s’y installer, non ?

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9 mars 2025 7 09 /03 /mars /2025 03:47

Se souvenir sans nostalgie, s’élancer sans effacer et pisser dans le sens du vent.

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8 mars 2025 6 08 /03 /mars /2025 03:21

– L’hirondelle ne chasse pas l’homme et voyage sans carte, dit l’un.

– Le marcheur partage son saucisson et ne fiente pas sur l’oiseau, répondit l’autre.

– Qui ça, moi ? Non, moi je n’ai rien à dire, en plus je ne parle pas, dit le canon César.

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7 mars 2025 5 07 /03 /mars /2025 03:22

J’ouvre le dictionnaire au hasard. Pantoufle. Euh... Zut, je n’ai rien à dire. Je recommence. Granit. Mince, rien à dire non plus, sinon que les faiseurs de mots ont bien fait les choses, j’aurais glissé mes pieds avec appréhension dans des granits et eu peu confiance en un mur en pantoufle.

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5 mars 2025 3 05 /03 /mars /2025 21:14

– Ah ah, heureusement non, Ana ne m’a rien demandé, mais je suis sûr qu’elle connaissait par cœur des pages entières du Vieux gringo et d’autres livres de Fuentes.

Tiens, c’est la première fois que j’entends Swann se livrer un peu. C’est un point de vue intéressant. C’est curieux ces divergences chez les humains. Vous mettez le même objet, un livre, dans les mains de trois personnes différentes et il se passe trois événements différents. Je me demande s’ils voient le même monde, tous, je me demande s’ils habitent le même monde. Pourtant, ils ont l’air de se comprendre ; ils parlent, ils blaguent, il leur arrive même de s’aimer. Mais est-ce que ce n’est pas seulement, comment dire, un ajustement ? Bizarre ! Nous, les nuages, on a des formes et des tailles différentes, mais on est beaucoup plus semblables, d’ailleurs, on se mélange, se sépare, se remélange, on ne reste jamais le même nuage. C’est ce sentiment d’être une personne, une personne que l’on n’a pas. (Ouh là là, voilà que je me mets à jouer avec les italiques comme eux, maintenant !) Je ne dis pas que c’est mieux ou moins bien. Je ne sais pas. (En plus, j’ai attrapé le virus de Ludmilla, je m’interroge.) Ils ont sûrement écrit des trucs là-dessus.

– Et toi, Brad, évidemment, tu as vu le film The Old Gringo avec Jane Fonda, s’amusa Ludmilla.

– Eh non, même pas. Ni livre ni film. De toute façon, je préfère la jeune gringa de la résidence universitaire…

– Oui enfin, une fake gringa. Pour le livre de Fuentes, je ne suis pas sûre qu’il te plairait. Le vieux gringo en question, c’est le Yankee Ambrose Bierce, un écrivain qui a vraiment existé et qui serait venu à plus de soixante-dix ans rejoindre les révolutionnaires mexicains en 1913. Fuentes imagine sa fin tragique aux côtés de Pancho Villa. Mais avant, pour de vrai, Bierce a écrit un Dictionnaire du diable, je suis sûre que ça, ça t’amuserait, il y a plein de définitions ironiques ou absurdes.

– Je vois, tu penses que les choses graves et sérieuses, comme les relations compliquées entre vous et les États-Unis, ne me concernent pas.

– Brad, désolée si je t’ai vexé. En fait, ce que je veux dire, très sérieusement, c’est que tu es tellement profondément et sincèrement cosmopolite que les histoires de choc des cultures te passent au-dessus de la tête. Pas vrai ? Tu as déjà passé tellement de frontières dans ta vie que tu sais bien que ce sont des inventions humaines complètement artificielles et arbitraires et tu te moques des différences de classe et d’origine. Et j’aime ça chez toi. Tu parles au pêcheur comme au fils de l’ambassadeur.

– C’est bien décrit, Ludmilla, c’est vrai, Brad a un peu l’identité nomade dont parle Le Clézio, ajouta Swann.

– Et moi, c’est plutôt une identité éclatée, c’est ça mon problème. Je suis gringa dehors, à cause de mon géniteur, mais je n’ai rien d’américain et je suis nahua dedans par Pap’, mais je ne parle pas le Nahuatl et je connais mal les coutumes.

– Ah bon ! Je ne savais pas que Diego n’était pas ton père biologique, s’étonna Swann.

– Brad le sait, je lui ai déjà raconté. C’est encore une histoire dans mon histoire. Je n’ai pas d’identité, mais je suis un recueil d’histoires incroyables à moi toute seule. Donc, il faut remonter à ma grand-mère, Mamá Marina, qui aurait aujourd’hui un peu moins de soixante ans. Elle est morte quand j’avais trois ans. Elle a eu ma mère à dix-huit ans et ma mère m’a eue à dix-neuf. Je vous laisse calculer. Enfin, tout ça est approximatif parce que l’état civil, à l’époque, ce n’était pas encore ça. Mon géniteur – je n’aime pas dire “père biologique” parce que la paternité n’a rien de biologique pour moi – c’était un client de ma mère, un Américain probablement. Évidemment, personne ne sait qui c’est et lui-même n’a aucune idée qu’il a une fille. Je suis née à la maison. Ce jour-là, il y avait Mamá Marina qui était là parce que ma mère habitait encore chez elle, et il y avait Pap’, c’était un voisin et un copain de ma grand-mère, il était venu donner du poisson. Eh bien, comme il était là, il a aidé. Ma mère a accouché, elle s’est lavée et elle est partie pendant deux jours. C’est ma grand-mère et Diego qui se sont occupés de moi. Quand un agent de l’état civil est passé, Diego m’avait dans les bras, alors, bingo, il a eu le gros lot ! Mamá a déclaré que je m’appelais Inmaculada Concepción de Santa María de Los Angeles, que ma mère c’était Purificación y Veneración de la Virgen de Guadalupe et que mon père c’était Cuauhtémoc Tlaloc Boris, ici présent. Il y avait aussi Juan Luis, le copain policier de Pap’ qui était passé dire bonjour, il était en uniforme, ça faisait sérieux et l’agent n’a pas posé de question, pas demandé de papier, il a juste tout noté au crayon de papier sur un carnet, après avoir fait répéter quand même trois fois tous les noms. Le plus incroyable de cette histoire, c’est qu’à partir de cette seconde, Diego est devenu le meilleur papa du monde, mais à un point…. vous ne pouvez pas imaginer. Il n’avait jamais eu d’enfant, et il avait déjà les mains abîmées et calleuses, et pourtant, dès cet instant, il m’a donné les caresses les plus tendres qu’une enfant ait jamais reçues. On était le 16 septembre 2004. Six mois plus tard, Juan Luis nous apportait un acte de naissance officiel, Pap’ s'appelait officiellement Diego Tlaloc et moi, Ludmilla de Los Angeles. Pap’ était tellement fier et heureux qu’il a tout accepté, comme ça. Il brandissait l’acte de naissance comme un diplôme ou un trophée, en courant et chantant. Nouvelle vie, nouvel homme, nouvelles responsabilités, donc, nouveau prénom, ça se tenait. C’était la valse des prénoms, mais ce n’est pas quelque chose qui doit vous choquer. Ma mère n’a rien dit, de toute façon, elle ne m’appelait jamais par mon prénom, elle disait toujours, hija, et toujours en criant. Elle n’aimait pas Pap’, parce qu’elle n’aimait personne, mais elle était bien contente qu’il s’occupe de moi et qu’il nous apporte du poisson.

Malheureusement, trois ans plus tard, Mamá Marina est morte. J’ai quelques souvenirs d’elle, ses grandes robes colorées, ses yeux toujours rieurs et lumineux, ses douces rondeurs, son corps était tellement confortable. Il y a eu un ou deux jours un peu compliqués. Peut-être que ma mémoire réécrit l’histoire, mais je me souviens que tout s’est enchaîné avec une étonnante évidence. Je vois encore le regard de Pap’, triste et complètement paniqué. Moi, j’avais compris que Mamá Marina ne reviendrait jamais, la rupture avait été brutale parce que, depuis ma naissance, elle ne m’avait jamais laissée plus d’une ou deux minutes. Mais j’ai senti aussi, quand Diego m’a prise dans ses bras et m’a regardée, que j’avais trouvé le lieu le plus sûr du monde, c’était une certitude. Et je pense – c’est là où ma mémoire romantise peut-être un peu, je ne sais pas –, je pense que j’ai réussi à lui faire passer ma confiance. Mon assurance l’a rassuré. Il a fallu s’organiser un peu, parce que Pap’ s’absentait pour pêcher, alors, Juan Luis et des voisines programmaient des roulements de visites quotidiennes. J’ai découvert la solitude et ça ne me gênait pas parce que je savais, d’un savoir inébranlable, que Diego revenait, lui, qu’il revenait toujours.

– Quelle histoire incroyable, dit Swann ! Tu dis ne pas avoir d’identité bien définie, mais tu as déjà une sacrée biographie. Et c’est tellement imprévisible, tu es si équilibrée et joyeuse.

– C’est vrai, je ne comprends pas non plus. En fait, je pense que ma mère ne m’a jamais rien donné, donc rien de son caractère non plus. Pap’, c’est le contraire, chaque seconde de sa vie, il la vivait pour moi, qu’il soit avec moi ou pas. C’est mon explication. Bon, je m’arrête là, même s’il y a d’autres épisodes pas piqués des hannetons, comme vous dites.

Ce récit terrible et émouvant plongea tout le monde dans un silence durable. Au bout de quelques minutes, Ludmilla dit en riant :

– Écoutez, j’ai trouvé la définition de road dans le dictionnaire de Bierce : « A strip of land along which one may pass from where it is too tiresome to be to where it is futile to go. Une bande de terre sur laquelle on passe de là où c’est ennuyeux d’être jusque là où c’est inutile d’aller. » Bon voyage mon Brad, time to hit the road !

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5 mars 2025 3 05 /03 /mars /2025 03:13

C’est mécanique et bien connu. Construisez de nouvelles routes et au lieu de fluidifier la circulation, vous verrez le nombre de voitures augmenter et les embouteillages s’intensifier. C’est pareil pour les bibliothèques pourtant, en mauvais urbaniste, je viens justement d’en acheter une nouvelle, pensant résorber les piles anarchiques qui menaçaient de s’effondrer et rendaient la circulation dans le bureau difficile. Je finirai enseveli sous des amas de livres inutiles et très lourds. Les écrivains sont responsables et coupables.

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4 mars 2025 2 04 /03 /mars /2025 03:09

C’est parfois difficile de faire la différence entre un malheureux aliéné qui parle tout seul et un heureux sain d’esprit qui téléphone en public. Ou peut-être n’y a-t-il pas de différence.

(Et moi, comme un crétin, j’ai toujours l’impression qu’on s’adresse à moi.)

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3 mars 2025 1 03 /03 /mars /2025 03:15

Ce n’est pas l’absence de l’autre qui isole, c’est la perte du temps, je veux dire la perte du passage. Nous sommes des passants et c’est toujours ainsi, en passant, que l’on se rencontre, se bouscule, s’aime ou se déchire. Et puis un jour, notre temps est dépassé, on ne passe plus. Seul demeure le passé, alors on se souvient. Seul.

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2 mars 2025 7 02 /03 /mars /2025 03:39

– Nous sommes bien peu de choses, dit la galaxie d’Andromède à sa voisine la Voie lactée, à peine quelques milliers de milliards d’étoiles. Presque rien. Souvenons-nous-en.  

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1 mars 2025 6 01 /03 /mars /2025 03:39

– Allez Dad, c’est le moment d’avouer. Le prénom de Swann, c’était pas à cause de Proust, c’était à cause de Dave, hein ?

Et Brad et Nadja d’entonner en chœur et en riant la chanson de Dave, « J’irai bien refaire un tour du côté de chez Swann / Revoir mon premier amour qui me donnait rendez-vous / Sous le chêne / Et se laissait embrasser sur la joue… »

– Quelle belle harmonie, mais je crois deviner un peu de moquerie dans votre ton, non ? Ludmilla, il faut que je t’explique, Dave est un chanteur hollandais installé en France, il a longtemps été classé parmi les « chanteurs à minettes », si tel est le cas, il y a beaucoup de minettes. Il a écrit une autobiographie au titre amusant, Du Côté de chez moi. Qu’on l’aime ou pas, il faut lui reconnaître une incroyable carrière, à plus de quatre-vingts ans, il est toujours présent à la télévision. Ce n’est peut-être pas un intellectuel, mais c’est un des grands chanteurs populaires et ces gens-là constituent aussi la culture.

– Mam, un extrait de Du Côté de chez moi ?

– Non, mais…

Et elle entonna Vanina, le tube de Dave, vite rejointe par Brad :

– « Loin de toi je me demande / Pourquoi ma vie ressemble / À une terre brûlée / Mais quand l'amour prend ses distances / Un seul être vous manque / Et tout est dépeuplé / Vanina rappelle-toi / Que je ne suis rien sans toi… ». Tu vois que je connais mes classiques.

– Merci, pour cette madeleine musicale, continua Swann. À la maison, dans les années 70, on ne lisait pas du Maïakovski et on n’écoutait pas du Chostakovitch, c’était Guy des Cars et Dave. Je viens de ce qu’on appelle les classes moyennes. Mon père était comptable et ma mère secrétaire, mais ces métiers étaient alimentaires, leur tâche unique, leur mission impérieuse a toujours été de donner la meilleure éducation à leur fils unique, aidés en cela par deux oncles célibataires et un peu désœuvrés. Sans trop savoir comment s’y prendre, ils ont essayé de me donner une culture qu’ils n’avaient pas. Je pense qu’ils ont réussi, mais je ne renie pas pour autant Dave.

– Je ne connaissais pas cet épisode, s’étonna Ludmilla. Et comment tu en es venu à lire Proust alors ?

– Oui, Proust, j’y viens. J’étais plutôt bon élève et en troisième, je me suis fait repérer par ma professeure de français. Dans mes rédactions j’essayais toujours de faire des phrases très longues et d’utiliser des mots rares. Dans le style, c’était le côté performance qui m’intéressait. À la fin de l’année, ma professeure m’a donné un livre en me disant, « lisez cela, vous verrez que l’on peut écrire des phrases longues qui soient très belles aussi ». C’était Albertine disparue, l’avant-dernier tome de La Recherche. Chérie, tu te souviens du début, quand le narrateur apprend qu’Albertine l’a quitté ?

– Ah oui, comment est-ce déjà ? « Mademoiselle Albertine est partie ! Comme la souffrance va plus loin en psychologie que la psychologie ! » Flute, je n’ai pas la suite. Ludmilla, tu ne nous trouverais pas ça sur Internet…

Agitant ses deux pouces avec une dextérité folle, elle s’exécuta en quelques secondes. Elle lut la suite.

– « Il y a un instant, en train de m’analyser, j’avais cru que cette séparation sans s’être revus était justement ce que je désirais, et comparant la médiocrité des plaisirs que me donnait Albertine à la richesse des désirs qu’elle me privait de réaliser, je m’étais trouvé subtil, j’avais conclu que je ne voulais plus la voir, que je ne l’aimais plus. Mais ces mots : “Mademoiselle Albertine est partie’’ venaient de produire dans mon cœur une souffrance telle que je ne pourrais pas y résister plus longtemps. »

– Merci Ludmilla. Quant à ma professeure, elle avait un certain génie pédagogique, car évidemment, j’ai voulu lire le reste de l’œuvre. Voilà donc pour ma rencontre avec Proust. Mais j’ai vite compris que ce n’était pas les histoires qui me passionnaient. Disons que je rencontrais l’autre, l’autre absolu. Tout ce que je n’étais pas, tout ce que je n’avais pas, tout ce que je ne ressentais pas. Une autre langue, une autre psychologie, un autre décor, d’autres sentiments.

– Un autre monde en quelque sorte ?

– Alors justement, oui et non. C’est là où mon approche s’écarte de celle de Nadja. À la maison, on exprimait peu ses sentiments et la Recherche m’a tout de suite paru très exotique à cet égard. Des bourgeois et des aristocrates, oisifs et lettrés, qui exprimaient jalousie, passion, haine, calcul, amour, perversion et le narrateur qui analysait tout cela… Je découvrais une Terra incognita. Mais Swann ou le baron de Charlus ou Robert de Saint-Loup étaient et restent des personnages, je veux dire des êtres de fiction, ils expriment des phrases écrites par Proust et je ne m’identifie jamais à eux. Donc, ce n’est pas un autre monde, parce que ce n’est pas un monde.

– Heureusement, interrompit Brad, parce que le narrateur est un brillant concurrent de Swann dans la catégorie des goujats. Je comparais la médiocrité de ce qu’elle me donnait à la richesse de ce dont elle me privait… Excusez-moi, mais quel gros nul.

– Voilà, toi, tu rentres dans l’histoire, Brad. Moi, je n’éprouve aucun sentiment pour les personnages, je ne les admire pas, je ne les condamne pas, je ne les juge pas, ce sont des personnages, des êtres d’encre et de papier. À l’époque, j’aimais leurs discours, enfin j’aimais l’écriture de Proust, mais à aucun moment le cadre de la fiction ne disparaissait. Aujourd’hui encore, quand je lis, je vois toujours la page sous la phrase et le livre dans mes mains. Comme au théâtre, je vois toujours le fauteuil devant moi, la scène et les rideaux sur le côté. Je ne me laisse jamais embarquer dans une histoire. En plus, je pense que « je lisais utile » à l’époque. Présenter Normale Sup’ sans connaître Proust n’était pas une option. Bon, à l’inverse, la connaissance de Proust n’était pas l’assurance d’avoir sa place à Ulm. J’ai raté deux fois le concours.

– … ce qui t’a permis de faire Science Po’ et un master de production culturelle et de devenir l’un des meilleurs Conseillers culturels que je connaisse… et j’en connais au moins trois !

– Ah, ah, quel honneur ! Tu as sans doute raison. Peut-être aussi que c’est un manque de sensibilité artistique, je suis plus à l’aise et plus efficace dans un monde de personnes réelles. Et puis les salons bourgeois français du début du XXe siècle m’ont paru un peu étouffants. J’ai délaissé Proust. Ensuite, sur les conseils de ton frère Andrzej, je me suis intéressé au continent sud-américain. D’ailleurs, mon plus grand fait d’armes reste quand même d’avoir fait découvrir à Ana le grand auteur mexicain Carlos Fuentes en lui offrant Le Vieux gringo. Évidemment, un an plus tard, elle avait lu tout Fuentes.

– D’ailleurs, laisse-moi deviner, taquina Brad, elle t’a demandé : – Dites-moi Swann, quel est votre livre préféré de Fuentes ? Et quel est votre passage préféré ?

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28 février 2025 5 28 /02 /février /2025 03:47

Raison, imagination, intuition, mémoire, intelligence, sensibilité… Le langage, comme un boucher armé d’un couteau effilé, découpe. C’est plus facile à manger ainsi, mais que reste-t-il du poulet dans son croupion, du cochon dans sa patte, du taureau dans ses amourettes ?

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27 février 2025 4 27 /02 /février /2025 03:12

Qui ne voit qu’il faut ralentir, diminuer, parler moins, agir peu et chanter plus.

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26 février 2025 3 26 /02 /février /2025 03:44

À la fin, nous serons tous indifférents et indifférenciés.

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