Œuf, déguisé en Auteur, souriant bêtement comme un Auteur et prenant une voix mielleuse d’Auteur : Bonjour Gros Lulu, je suis l’Auteur.
Gros Lulu : Ah bon ! Mais alors monsieur l’Auteur n’est pas l’auteur.
Œuf/l’Auteur : En effet, il ne saurait y avoir qu’un seul auteur et ce monsieur Lhoteur est un usurpateur, un usurpauteur oserais-je même.
Gros Lulu, à monsieur Lhoteur : Dites donc, vous avez vu l’Auteur. C’est bizarre, il ressemble à un œuf, je l’imaginais bien un peu dégarni, mais je le pensais plus mûr et moins ovale.
Monsieur Lhoteur : Les auteurs sont d’éternels absents, on est toujours réduit à les imaginer ; d’ailleurs, c’est préférable. L’homme n’est jamais à la hauteur de l’artiste, alors quand l’artiste lui-même est de petite taille, je te laisse deviner la suite.
Gros Lulu, à Œuf/Auteur : Je suis bien content de vous rencontrer, monsieur l’Auteur, parce que je voulais vous parler de mon texte et des personnages de mon dialogue et de monsieur l’Auteur.
Œuf/Auteur : Attention aux impsauteurs, Lol ! Justement, Gros, je venais pour en savoir plus. Sur une échelle de 1 à 10, tu trouves mon écriture comment ?
Gros Lulu : Ben des fois, ça vole pas très haut, je dirai un 2.
Œuf/Auteur : Raté. Je suis un œuf. PTDR.
Gros Lulu : Un 9 ! Alors là, excusez-moi, mais vous êtes un peu prétentieux. En plus vous ne pouvez pas vous noter vous-même.
Œuf/Auteur : Je ne me note pas, Gros, je me décris. J’ai dit un œuf, pas un 9.
Gros Lulu : Eh ben moi, je redis 2, vous valez 2. Je n’aime pas vos dialogues, on ne comprend rien. L’auteur n’est pas l’auteur, le neuf n’est pas le neuf, c’est n’importe quoi. En plus moi, c’est pas Gros, c’est Gros Lulu
Œuf/Auteur : OK ça va, te fâche pas Gros, regarde-moi bien, je ne suis pas l’auteur, je suis Œuf. J’habite dans le dialogue d’à côté avec Poule et Panda. Je t’ai fait un prank. Je suis venu chez toi parce que Poule m’ennuie, elle n’aime pas mes pranks, elle préfère ses kids et ses coqs.
Gros Lulu : Oh trop cool ! Tu m’as bien eu. J’adore. Moi aussi je m’ennuie ici avec mon partenaire, c’est monsieur l’Auteur, mais il dit toujours qu’il n’est pas l’auteur. Il n’est pas comme toi, Œuf, il ne fait jamais de blague et il est fier pour de vrai.
Monsieur Lhoteur : Gros Lulu, tu ne comprendras donc jamais, je ne suis ni auteur ni fier. Je suis un personnage. Et c’est l’auteur, le vrai, enfin je me comprends, qui invente les personnages, ce qu’ils disent et ce qu’ils sont. Et comme il manque d’imagination, il utilise toujours la même technique de la complémentarité antagonique, comme pour les couleurs.
Gros Lulu, à voix basse à Œuf : Tu comprends pourquoi je n’aime pas mon dialogue, je ne me sens pas à ma place et l’autre, il parle pas comme nous.
Monsieur Lhoteur : Inutile de parler à voix basse Gros Lulu, ton texte est écrit. Tant pis je continue, je n’ai pas le choix, moi aussi j’ai un texte qu’on m’impose. Donc. On ne met pas du rouge avec du rose, parce qu’au mieux ça jure et au pire on voit mal la différence. En revanche, du vert sur du rouge, ça pète, parce que c’est la secondaire complémentaire de sa primaire. L’antagonisme relatif rehausse.
Œuf, à voix basse à Gros Lulu : T’as raison, c’est un grand malade ton Lhoteur.
Gros Lulu, à Œuf : C’est vrai, mais on dit pas “ton l’Auteur”, c’est pas français.
Monsieur Lhoteur : Ouh là ! On se surpasse, c’est un festival d’inepties et on atteint des sommets. Tant pis, je poursuis seul : le savoir isole. Donc, si tu associes un crétin à un abruti, ça jure, alors on met un arrogant avec un simplet ou bien une emmerdeuse avec un joyeux drille. Je vous laisse deviner qui est qui.
Gros Lulu, à Œuf, souriant : Je n’aime pas ses devinettes, elles ne sont pas drôles. Et puis, même si tu es un blanc-bec rouge et moi un bleu-bite rose, je rigole plus avec toi, repasse quand tu veux.
Œuf, à Gros Lulu, riant : Tu as bien raison, il faut voir la vie en rose bonbon plutôt que d’avoir des idées de boudin noires, MDR.
Monsieur Lhoteur : Eh non, on n’avait pas encore atteint le sommet ! Pour le reste, merci de confirmer ce que je dis. Vous êtes jaune pisseux et jaune caca d’oie, donc ça jure. Vous ne serez jamais dans le même dialogue. Tandis que Sancho Panza et don Quichotte ou Elvire et Dom Juan… ça pète.
[L’auteur, les chaussures encore crottées après une longue promenade en montagne, agacé que ses personnages parlent sans son accord : Décidément, Gros Lulu est égal à lui-même, un benêt inoffensif, mais Œuf est culotté, il n’a rien à faire dans ce dialogue, ça va tourner au vinaigre ce mélange de personnages. Quant à monsieur Lhoteur, c’est officiel, je ne l’aime pas, toujours à parler de haut ; je lui ferais remarquer que sa théorie des complémentaires aurait bien du mal à expliquer la pertinence du couple Dupond et Dupont.]