Bon on se calme, ce n’est pas la fin du monde, on compte ses doigts de pieds et on épluche ses pommes de terre.
Bon on se calme, ce n’est pas la fin du monde, on compte ses doigts de pieds et on épluche ses pommes de terre.
Quant à elle, c’est une princesse, une déesse, que dis-je ?, un rêve de feu. Elle est mon Himalaya, mon Olympe, que dis-je ?, mon firmament – moi, le terrien.
La vérité n’est pas une étoile qui brille au loin et dont on se rapprocherait, c’est une étincelle qui nait de la friction d’idées ou de mots, comme quand l’on frotte des silex. Ça peut aveugler et faire mal aux pouces, mais ça chauffe le cœur toujours et fait briller les yeux.
Si vous entrez dans le cerveau d’un philosophe, soyez prudent, vous trouverez des échafaudages complexes et hasardeux ; des chutes d’objets denses et coupants sont possibles, vous risquez d'y rester. Si vous entrez dans le cerveau d’un poète, soyez prudent aussi, vous risquez de vous y plaire et y rester également.
On en vient un jour à se plagier soi-même. Ce n’est pas la conscience qui se relâche mais la mémoire.
La tête ailleurs
Les mains oisives
Mes pieds nous ramènent
On se représente parfois la nature comme une mère, sage et respectueuse ou une vieille dame patronnesse sur le retour. Elle me fait plutôt l’effet d’une chercheuse infatigable, tentant tout, osant tout, sans tabou ni limite, telle une jeune artiste un peu folle qui n’aurait d’autre loi que la joie de créer.
Les plus belles idées, comme les amis, arrivent à l’improviste.
Alors je rappelle aux randonneurs qu’il existe deux zones de 500 mètres, au-delà du départ et avant l’arrivée, dans lesquelles on n’est pas obligé de se dire bonjour. On y est encore (ou redevient) urbains et on est prié de s’ignorer poliment.
L’histoire terrible se passa lors d’une nuit d’hiver sans lune, dans une région retirée et peu peuplée. Personne ne vit rien, personne n’entendit rien. Ça avait sûrement eu lieu bien après la tombée de la nuit mais avant l’aube car au petit matin il ne restait déjà plus aucune trace, d’aucun passage. On ne retrouva ni le corps, ni l’arme du crime. La police scientifique enquêta sur place une bonne semaine et passa plus d’un moins à analyser les échantillons de mousses, lichens et branches cassées, en vain. Ça avait dû être horrible, selon un gendarme expérimenté qui demanda à rester anonyme, un travail de pervers méticuleux. Au village, on en parlait bien sûr, mais on restait solidaires. Ce n’est pas parce que l’on ne savait rien que l’on devait subir docilement et attendre passivement qu’une autre histoire terrible ait lieu. La victime était probablement une femme, sans doute une adolescente, peut-être même une enfant – comment avait-il pu faire une chose pareille ? – une fille d’un autre village, puisqu’ici personne ne manquait. Pour la malheureuse, on ne sut jamais. En un sens, c’était peut-être mieux ainsi. Quant au coupable, ou plutôt au monstre, on l’avait retrouvé, dieu merci, le matin même de l’histoire terrible. Il tenta de nier bien sûr, dans sa langue que personne ne comprenait, nul ne fut dupe pourtant et l’on protégea définitivement la communauté de ses récidives futures.
Le désir n’est pas l’envie, l’une épuise quand l’autre anime.
L’écriture est un voyage en solitaire sans grand risque de se perdre : on ne navigue jamais loin de la côte, un jet d’encre à peine.
Alors quand vous cherchez Walcott sur les moteurs de recherche, vous tombez sur Theo, pas sur Derek le prix Nobel de littérature, non sur le footballeur Theo Walcott. Bon cela étant, il est vrai que Theo vient de battre le record du monde de hauteur de contrôle de ballon, la performance a été validée par un huissier mandaté par le Guinness World Record – 34 mètres du sol.
Inutile de vous dire que le pauvre Derek ne contrôle plus grand-chose à cette hauteur-là.
Cette histoire de poule et d’œuf est en creux une sociologie de la famille : elle parle de l’absence du père.
Pour autant que l’on puisse le savoir (dans la mesure où la métaphysique animale – faute de moyen – progresse peu) tout laisse à penser que la poule (comme probablement l’œuf) se moque bien de savoir si le gland a précédé ou suivi le chêne dans l’histoire du vivant.
Et si tu dois te taire, fais-le sans bruit.
Prendre du recul pour mieux se comprendre.
Le conseil est judicieux mais inepte : autant demander d’avancer et reculer, simultanément, de deux pas.
Zorille, dites-vous. Serait-ce un gorille de zoo ?
Au pays du vin
Je bois mon jus de betteraves
Divinement étranger
En nous laissant vieillir lentement, lentement, la mort joue avec nous comme le chat joue avec la souris longtemps, longtemps, avant de la croquer d’un coup sec.
Z.A.D.
– Lâchez rien ! Les fusiliers sont sur zone, s’égosilla Mazarine, harangueuse zélée qui en imposait malgré son format bonzaï.
– Pas de lézards, on va pas s’écraser, répondirent Zayd et Ziad, deux Tunisiens homozygotes aux yeux azur (c’était beau mais ça faisait bizarre).
Bien disposés à résister, les zadistes étaient prêts.
– Allez, faites pas les zouaves, déposez les armes.
– Peau d’zebbi, z’aurez pas nos bazookas ni nos panzers, because on est trop zaraf !, opposa résolument Frantz qui avait appris le Französisch avec Rodriguez, et la présomption de bienfaisance ?, ajouta-t-il dans un français peu usité.
Ils étaient nombreux, au moins cent douze ou deux cent treize, peut-être. Il y avait Zoé, Liz et Zélia (encore très jeunes mais plus très zens) et Aziz, balèze et rusé, et Suzon, pleine de désir pour son “zoli basané” comme elle disait, et qu’elle couvrait de bisous.
– Bon, vous descendez des arbres, on n’est pas au zoo ; c’est compris, vous dégagez paisiblement ou on utilise les gaz.
– Primo, z’êtes que des sales Nazis ! Deuzio, ça va zlataner dur, bande de tarlouzes, ironisa Soizic, une ex miss Arzon, vigoureuse comme un maquisard et gracieuse comme un bronze (mais peu soucieuse de ciseler ses phrases) ; c’est cela, c’est vous qui dégagez présentement, misérables barbouzes, vous nous occultez l’horizon, préconisa Zéphirin dans un style moins zolien que balzacien.
Et puis des zigs du coin aussi, et des gonzesses, pas venues que pour causer, des producteurs de colza ou des fumeurs de luzerne, des joueurs de zarb ou de gazou, des professionnels de la zizanie et des spécialistes du buzz. Ce n’était pas le château de Laze mais on y vivait bien, à la Z.A.D., sans topazes ni perlouzes.
– Vous vous prenez pour des zapatistes ou quoi ? Allez, virez de là ou on dézingue tout. On ne plaisante plus.
– Mazette, s’avisa Enzo terrorisé, sont grave nazes les zombies rasés !
– Triple buse, ça va partouzer, se réjouirent de leur côté Zadig et Azora (Zinedine et Zahia, de leurs vrais noms).
Et Bazile et Zébulon, deux drôles de zozos à tête de bonze, et Fernandez qui cachait son eczéma derrière son masque de Zorro et Lorenzo déguisé en Tarzan, avec son falzar en peau de zébu.
– Soyez raisonnables les enfants, libérez la zone, osa posément un gradé élevé chez les Jésuites.
– Soyez enfants, les raisonnables, dézonez la liberté, s’amusa Zaza, une ex-zazou.
Et Zbigniew le poète qui venait de Zdzieszowice mais il était plus showbiz que kolkhoz, Zénon, le philosophe déphasé aux idées zarbies et Balthazar (référence à la bouteille pas aux rois mages), le jazzophile qui voyait la vie en rose (référence à Armstrong pas à Piaf).
– Libérez la zone, entendez-vous, deuxième sommation, bissa le gradé, avec un zeste de suffisance (l'effet Jèses).
– Zut, y vont nous zigouiller, les boules à zéro. Balancez tout et visez bien, le chorizo et les bretzels, le zan, le ouzo, les zakouskis (non, pas la pizza, j’ai pas fini ! supplia Zazie qui avait toujours un métro de retard), la mozzarelle, le pain azyme et tout le bazar. Banzai, et que ça fuse, on passe en mode Gaza !
– Non mais ils sont complétement azimutés, qu’est-ce qu’on fait chef, c’est le binz complet et j’ai de la merguez moisie dans le casque ?
– Partisans de toutes les Z.A.D., chargez, hurla la fougueuse Suzanne, on va leur faire bouffer le gazon.
– Euh..., alors chargez également, hésita le gradé, définitivement désabusé.
L’enfant, souvent, refuse de faire la sieste : le petit bêta s’ennuie quand il est couché. Plus tard, l’adulte rechigne à la quitter : le gros bêta s’ennuie quand il est debout.
L’y. Ni grec ni libyen, ni yéménite, ni maya, ni byzantin non plus, ni tyrolien, l’y est pourtant la plus étrangère des lettres françaises, sympathique mais pour le moins typée.
Ayatollah iranien, bayadère hindoue, bey turc, voyez, que des étrangers !, boys yankees, deys algériens, on en voit du pays, pygmées du Congo, yeoman anglais et sa lady… Bon, il y a bien Yvette et Yolande, les deux sœurs Robert qui ont repris la charcuterie familiale à Y mais – pour des raisons incroyables, trop longues à raconter ici – elles ne sont pas Ypsiloniennes de souche, elles ont grandi à Matigny.
On peut continuer avec les animaux, yak de l’Himalaya, oryx de Libye, hyène rayée des savanes (à distinguer du coyote), que des y !, mygale d’Amazonie, yéti tibétain, lynx canadien, pygargue (ou aigle chauve) de l’Alaska et gypaète (ou vautour barbu) de l’Altaï ; même chose avec les végétaux, papayer, cacaoyer, goyavier, yuccas, cycas, peyotl, soya, yuzu, ylang-ylang de Mayotte, sans parler des plats cuisinés qui nous font voyager, yakitori nippon, y encore, yaourt bulgare (ou yogourt ; non, la yourte, c’est autre chose), yassa sénégalais, carry “réyoné” (comme on dit au pays du maloya). Y toujours pour les créatures effrayantes, le cyclope, le cynocéphale, le lycanthrope, la nymphe (bien sûr que c’est effrayant une nymphe, parce que vous pouvez être sûr que pas très loin vous allez trouver un satyre – satyre, tiens, y, comme par hasard) et l’hydre de Lerne.
Que d’étrangetés ! Pas étonnant que la génération Y ait du mal à se trouver.
[Pour info on prononce génération “ouaille”, comme le Y anglais, ce qui donne d’ailleurs why, qui veut dire pourquoi – ça se confirme !]
Non, Gandhi n’a jamais dit « qu’importe le chemin tant qu’il mène aux putes ».
L’x. Les voix de l’x (rien de sexuel ici, juste une réflexion) sont déjà complexes alors inutile d’exagérer. On peut ‘ksier’ ou ‘kséer’ l’x, comme dans exciser ou excéder, on peut le ‘gzaer’ voire le ‘gzuer’, comme dans examen ou exhumer, on peut le ‘séer’ ou le ‘zier’, dix, dixième, on peut même le passer sous silence comme dans heureux. Mais tâchons de ne pas le ‘skuer’, escursion n’existe pas, ne pas le ‘skréer’, escrément non plus, ni le ‘skoer’, pas d’escommunion (sauf dans le lexique mexicain peut-être).
Aucunes excuses (même exquises) ne seront exigées pour ne pas vexer les dyslexiques mais moins de laxisme et plus d’exactitude ne seraient pas du luxe.