La signalisation claire et précise, la géolocalisation de plus en plus fine, les marquages et repères omniprésents masquent plutôt bien notre totale déroute.
La signalisation claire et précise, la géolocalisation de plus en plus fine, les marquages et repères omniprésents masquent plutôt bien notre totale déroute.
On dit que les amateurs de desserts sont plus doux, plus généreux, plus affectueux, plus aimables. Je ne sais.
Ils sont souvent plus gros.
– Dis-moi Poule, pourquoi tu as quatre doigts alors que l’autruche en a deux ?
– Et toi Œuf, pourquoi tu vis dans une boite de douze et pas de sept ou de trente-huit ?
– Ce qui compte ne se compte pas, trancha Panda. Dites les copains, ça fait longtemps qu’on n’a pas joué à la Bonne Paye…
Je ne comprends pas tous ces gens qui préfèrent les fictions à la réalité. Moi j’adore la réalité, surtout celle que je m’invente.
C’est à la même époque – aujourd’hui – que l’on ne supporte plus la douleur provoquée par un poil incarné et que l’on reste indifférent aux grandes catastrophes qui ravagent la planète. Hypersensibilité et insensibilité cohabitent paradoxalement.
À la sainteté aussi on s’habitue. Elle finit même par lasser.
L’erreur majeure de ces quatre derniers siècles est la croyance au moi. Croire que je peux, que je veux, que je choisis et décide. Et l’erreur a des effets insoupçonnés. Bien évidemment, cela ne signifie pas qu’il faut cesser de vouloir, choisir ou décider.
Les aubes sont bien plus belles que les crépuscules.
(Mais quelle idée de les programmer si tôt !)
Beaucoup de philosophes, sociologues, psychologues, prêtres, shamans, coachs et herboristes se sont penchés sur la question du bonheur. Sur l’origine du malheur, peu de choses en revanche. Dommage, je parie qu’on trouverait beaucoup d’énergie, de la constance voire de l'acharnement, de l’habileté et une imagination sans limites. Je veux dire pour le fabriquer.
La définition des concepts les plus abstraits (la liberté, la vérité, le devoir, la joie…) tient en quelques mots ; les dictionnaires en attestent. Le sens, lui, a besoin de temps et d’espace, il est bien trop à l’étroit dans une définition.
– Dis donc Poule, ça fait un moment qu’on n’a pas vu Panda, non ?
– C’est vrai ça Œuf, tu crois que ça a un rapport avec la naissance des jumelles au zoo de Beauval.
– La vraie présence est toujours épiphanique et l’absence, une modalité phénoménale de la trace. Bonjour les amis, je vous ai manqué, synthétisa Panda.
– Alors là, pas du tout.
– Vraiment n’importe quoi.
D’accord, un clin d’œil, un coup de coude, un sourire, ça peut être beau, puissant, troublant, et un silence ou un regard soutenu, ça peut inspirer, bousculer, transporter, d’accord. Mais les mots.
Mais qui a bien pu inventer la pince à linge ?
Le développement personnel ne serait quand même pas le développement de l’aptitude à se soumettre aux idées personnelles d’une autre personne. Non, quand même pas.
L’art enseigne l’indisponibilité.
Les musées, en vous faisant systématiquement passer par une « boutique » à la sortie, désapprennent ce que les œuvres apprennent.
Quand a-t-on cessé d’écouter les rêveurs pour suivre les comptables ?
Qu'on ne s'y trompe pas, l'homme n'est pas un dieu fini, c'est dieu qui est un homme privė d'horizon.
Ce n’est pas parce que la liberté est illusoire qu’il faut se résigner et suivre ; ce n’est pas parce que la volonté est tangible qu’il faut y croire et tout casser.
D’accord, il y a Sophocle, Rabelais et Joyce, mais allez vous promener cinq minutes en forêt, ouvrez les yeux, écoutez, sentez, participez. Comment ne pas reconnaître qu’en termes de poésie – je veux dire diversité, inventivité, imprévisibilité, intensité, sans parler de vitalité – on rame un peu.
– Salut Œuf, tu viens faire une partie de fléchettes ? Je rêve de voir ce que tu as dans le ventre.
– Mort de rire ! Au fait Poule, tu sais qu’ils font une promo chez KFC, 15 € les 12 cuisses ? Ah ben non, je suis bête, tu n’es pas cœur de cible !
– La cible est le rêve de l’arc, la flèche n’est pas le flèche et le bambou est dans ton cœur, conclut Panda qui disparut avant même la fin de sa phrase.
– ?!
– !?
Elles migrent à la recherche d’une terre d’accueil, les idées. Le bruit est insalubre ; le silence, infécond.
À partir de quand a-t-on commencé à s’habituer à vivre dans la laideur, le bruit et le mensonge ?
Hier, à Rome, je crois avoir croisé Adèle Exarchopoulos. J’ai salué et souri. Elle ne m’a pas vu. Ça ne devait pas être elle.
Heureusement d’ailleurs, car j’étais infoutu de me souvenir de son nom sur le moment. J’aurais eu l’air malin !
Nous, les vieux, on inspire confiance.
(Les cons, s'ils savaient.)
« Trou ».
Je me permets de sortir moi-même de son contexte ce mot terrible qui perd ainsi son inexcusable violence et ne risque plus de me valoir procès et insultes.