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C'est Peu Dire

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Un Reste À Retrouver

31 janvier 2023 2 31 /01 /janvier /2023 00:14

– Gros Lulu : Bonjour monsieur l’Auteur. Est-ce que vous avez prévu de bons dialogues pour vos personnages en 2023 ?

– Monsieur Lhoteur : Bonjour. C’est à l’auteur que tu dois demander, moi je suis un personnage.

– G. L. : Ah oui c’est vrai ! J’oublie toujours, vous êtes Monsieur l’auteur qui n’est pas l’auteur. Hi, hi ! Et donc, pour les dialogues ?

– M. L. : Je n’écris rien. Ni dialogue ni monologue.

– G. L. : Waouh, un monologue, c’est vrai, j’y pensais pas ! Qu’est-ce que j’aimerais, un jour, dire un monologue. Ça ressemble à quoi ?

– M. L. : Oh tu sais, c’est très surfait. Dans la vraie vie, il n’y a que ça. Les personnes ne dialoguent jamais, leurs conversations ne sont que monologues intermittents. C’est donc faux, mais vraiment faux. Au théâtre seulement on trouve de vrais dialogues, sauf que ce n’est pas vrai. C’est faussement vrai. Tu comprends ?

– G. L. : Toujours pas. C’est pour ça que je préférerais un monologue parce que, enfin souvent dans les dialogues, je ne comprends pas ce que l’autre il dit. C’est votre faute aussi, un auteur, ça doit s’adapter à ses personnages !

– M. L. : Oh, tu te calmes ! Primo, je ne suis pas l’auteur. Secundo, c’est notre auteur qui dans son néocortex altéré a imaginé un Gros Lulu pataud et rustique et un Monsieur Lhoteur fat et acariâtre. Une façon de se soigner en extériorisant ses pathologies et ses vices, comme ils le font tous.

– G. L. : Et voilà ! Vous m’avez encore perdu.

– M. L. : Allez tiens, pour faire la nique à l’auteur, je vais être humble et aimable. Je vais te pondre un truc.

– G. L. : Vous m’en voyez ravi et je vous en sais gré. Vous avez compris que la solitude ne me convient pas ; j’ai besoin de tu, de toi, de vous. Le silence me tue, je me nourris de verbes et d’adverbes. Et si c’est une marque d’incomplétude, eh bien je l’accepte, je l’assume, que dis-je, je la veux. Je suis manque et absence, je suis appel. Je suis un regard sans spectacle, une caresse sans main, je suis un fleuve sans rives, un chant muet, une course immobile. Je ne me complains pas, non, je t’appelle, toi, toi et toi encore. Que nos mots s’acoquinent et nos sourires. Que la joie nous enfrissonne et nous conjoigne le souffle.

– M. L. : Alors ?

– G. L. : Alors quoi ? C’est ça votre monologue ? Mais qui dira ça dans la vraie vie ? Même au théâtre ça passera pas. Votre problème, je vais vous dire Monsieur l’Auteur, c’est que vous séparez la vie et l’écriture. Il faut mélanger et bien secouer, comme pour la vinaigrette.

– G. L. : Mettre du théâtral dans les personnes pour figer un peu le bougé fou de la vie et mettre du vivant dans les personnages de papier qu’ils brûlent eux aussi et sentent.

– M. L. : Et là, qui a parlé ? C’est moi qu’on égare cette fois.

– G. L. : Ben c’était moi, c’est marqué “– G. L.”. Enfin un peu moi, un peu vous, un peu l’auteur, un peu le lecteur au-dessus de son épaule… le grand fourre-tout de l’écriture, je vous ai déjà expliqué, la vinaigrette.

(L’auteur, finissant son trio de quinoa au curry de Madras, néanmoins soucieux de la santé de ses personnages : Bien sûr, la vinaigrette ! Ah il finit par m’amuser ce Gros Lulu. En revanche Monsieur Lhoteur m’insupporte de plus en plus, je vais te lui coller un Gilles de La Tourette et on va voir comment il va parler et s’il s'enfrissonne.)

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