J’ai longtemps pensé que la marge étroite sur laquelle je marche me situait dangereusement entre le mou à droite et le cru à gauche, la norme et la folie, le plan-plan et l’effondrement… et qu’il suffirait de peu pour que je bascule et m’abîme dans le gouffre effrayant de la démence.
C’était sans compter l’illusion d’optique (celle-là due à la vision du bas que j’ai du haut de mon mètre quatre-vingt-dix − moins approximativement dix centimètres, pour être exact, puisqu’il ne vous aura pas échappé que nos yeux n’occupent pas le sommet du crâne, ce qui, notez-le, est une chance pour tous les fats qui seraient alors contraints de baisser le nez pour voir devant eux et pour tous les timides qui devraient se plier en deux pour regarder leurs chaussures) qui m’a fait prendre pour une marge au bord d’un précipice, une large bande imprécise sur un terrain plat.