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C'est Peu Dire

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Un Reste À Retrouver

11 août 2020 2 11 /08 /août /2020 09:08

C

Faut-il aussi qu’une lettre soit ouverte ou fermée ? En voici un cas de conscience.

À l’écoute déjà, le C balance entre le S de ‘cesse’ et le K de ‘casse’, c’est comme ça, une occlusive qui sait siffler aussi (sans parler de ce chuintement comique quand il est au contact d’un H). À l’écrit encore, c’est un cas particulier, ni clos comme un O, ni ouvert comme un I – serait-il indécis ? On imagine une enfance compliquée : cercle claustrophobe, le C aurait fracassé une cloison pour clamer son existence et accueillir des clandestins, ou au contraire, arc quasi rectiligne, sans cachette aucune, il aurait recourbé ses extrémités, pour se construire un coin à soi. Incertain, le C se cherche.

Si on le bouscule, le C basculera à gauche, ensuite, tel un culbuto moqueur et farceur, il reviendra toujours à sa nouvelle place et sera aquarium ou casserole ou pot à incontinence, bref un contenant très commode, mais pas un C. S’il se casse la figure à droite, il fera un tunnel court et sans mystère ou un coussin confortable ou un serre-tête pour écolière classique, mais pas un C non plus. Au contraire, dans sa condition initiale, le C est en équilibre instable, il tient on ne sait comment sur le côté. Incertain, le C se cherche.

Pourtant, vu d’ici, c’est clair, le C est une courbure, celle d’un corps – c’est la courbure de votre cul ou le creux de votre cou. Couchez-le, dupliquez-le et vous obtenez un corsage échancré qui invite à la caresse.

Voilà c’est ça, le C est la trace d’une caresse. Et le geste d’une alliance. Quand la main passe et repasse mais ne reste pas, quand elle court sur le corps et circule en surface, quelque part au-dessus du cœur. Caresse lexicale encore, quand le mot console ou cajole, quand il berce et consonne, sans vouloir convaincre. Doucement chorégraphié, sincèrement calligraphié, le C jamais ne passe en force, il ne s’impose pas, il épouse la chair des corps et le contour des courbes.

Le C n’est pas une chose, c’est une trace, c’est un geste. La trace d’une caresse qui connaît la bonne distance. Le geste d’une alliance qui renonce à conquérir.

Le C est délicat et câlin, il ne proclame rien, ne combat pas, ne capture pas, ne confisque pas, il sait même céder. Toujours en quête, il écoute mais ne conclut pas. Incertain, le C se cherche.

Mais ce n’est pas un casse-tête, le C ne cache aucun secret, ce n’est pas une crypte, ni un caveau, ni un coffre cadenassé, on aperçoit simplement un petit recoin discret, en contrebas, pour se recueillir et ne pas être sans cesse exposé.   

Le C inspire confiance, comme un confident qui comprend sans cerner, un complice qui explicite et incite sans excès, un compagnon qui accompagne sans s’accrocher, sans s’incruster, qui contente sans contenir.

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