Si j’étais riche ou puissant, je commanderais des poèmes sur mesure, comme on fait construire une maison à son goût ou couper un costume à sa taille. Des poèmes pour moi. Un poème pour l’hiver ou les nuits de pleine lune ; un grand poème confortable, pour recevoir les amis ou un plus petit, silencieux et secret, pour rêver à voix basse ; un poème débraillé, fleuri, généreux, un autre lent et grave et solennel ; un poème naïf et bancal ou troué, un autre lucide jusqu’à la brûlure.
Alors, chaque jour, dans ma collection de poèmes, j’en choisirais un ou deux bien accordés aux couleurs du temps et à l’humeur du moment. Parfois, je les déclamerais à la cantonade pour faire mon intéressant et parfois, je les glisserais discrètement dans une poche, comme on glisse son numéro de téléphone.
Ce n’est pas toujours très joli, un poème mais souvent, ça réjouit.