Éloge de la mollesse,
vertu de la faiblesse.
Paraisse ! haïku modeste.
Éloge de la mollesse,
vertu de la faiblesse.
Paraisse ! haïku modeste.
Je ne sais par quelle habileté géométrique il conciliait une raideur sèche et inflexible et un égocentrisme flasque et bedonnant.
Vous me demandez où je vais chercher tout ça. Comprenez, je ne peux répondre : un détaillant ne donne jamais l’adresse de son grossiste.
La magie intime de la fadeur, le souffle secret de l’ordinaire, le faste délicat du banal, le ravissement divin du déclin. Les limites de l’auto-persuasion.
c’est-à-dire je ne sais pas bien comment t’expliquer voilà ce que je voudrais enfin disons ce que je vise malgré les apparences c’est l’essentiel comme on pourrait dire voilà ça veut dire tout mais tout vraiment tout je veux arriver à tout dire je t’explique tout dire mais en résumé bien sûr autrement ça serait trop long je cherche le résumé de tout un seul résumé du tout tu vois tout mais sans détour sans annexe sans complément sans développement enfin le tout tout d’un coup c’est-à-dire en fait presque rien mille pages contractées dix mille ans condensés cent mille millénaires concentrés et encore ça c’est rien en fait tout dans une seule phrase une phrase brève dense saturée juste quelques mots des mots courts et simples bon ça a l’air impossible quatre mots moins peut-être faut voir je crois que l’on pourrait essayer quand même ce serait un cri à peine articulé pas d’adjectif pas d’adverbe pas de citation pas de ponctuation pas de complément d’objet indirect pas d’hésitation pas de rature un râle qui claquerait comme un coup de tonnerre comme un big bang des mots non pas un râle un appel une évidence pleine totale trois mots moins peut-être faut voir alors ça ne serait pas nécessairement facile à comprendre là tu as raison mais ça serait impossible à résumer tu vois la puissance voilà ça serait totalement impossible à résumer ça j’adore non mais tu réalises le truc on atteindrait l’indépassable deux mots ça serait peut-être pas assez faut voir tout Levy tout Rowling tout Victor Hugo mais ça c’est rien encore tout en fait complètement tout même la Bible en entier les modes d’emploi dans toutes les langues les revues de pêche tous les murs de tout facebook tous les tags partout juste compressés dans ma phrase enfin même pas une phrase juste deux ou trois mots deux ça sera vraiment difficile faut pas abuser non plus disons trois peut-être quatre bon je la cherche encore ma phrase là on est d’accord c’est pas fini mais tu comprends le projet tu saisis ça serait la révolution un moment historique tu pourrais l’apprendre par cœur ma phrase et l’emmener partout on pourrait tous la connaître on aurait tous tous les mots en un fichier compressé si on veut dire ça comme ça après bien sûr il faudrait dézipper c’est pour ça qu’il ne faut pas se tromper t’imagines la responsabilité si tu résumes mal Victor Hugo et qu’on ne peut plus retrouver les Misérables c’est hyper compliqué à faire en gros c’est ça mon projet il faut être très très méthodique et sobre aussi et impartial parce que tu peux vite subir des pressions et qu’on t’impose des mots que tu ne veux même pas garder tu dois être intraitable et sans pitié il faut trier et jeter je ne te cache pas que ça me prend tout mon temps c’est un boulot de fou parce que tu as compris le problème tu dois tout considérer pour que ce soit le résumé de tout ah oui parce que je ne veux pas qu’on puisse me dire après oui mais vous n’avez pas pris en compte le chapitre 14 des Misérables dans votre résumé du tout ça se voit bien donc ce n’est pas le résumé de complètement tout et donc gnan gnan gnan etc et toi tu es obligé de tout recommencer depuis le début parce que ça décale tout évidemment donc tu dois tout résumer absolument tout mais tu ne dois pratiquement rien garder juste trois mots en tout ou quatre je n’ai pas encore bien décidé autrement tu es vite débordé et puis surtout ton résumé est encore résumable alors ça non pas question qu’on me dise un jour au fait j’ai fait un petit résumé de votre résumé là ce serait la honte donc voilà c’est ça en gros mon travail c’est très très long et bon je n’ai pas eu trop le temps de repeindre le portail
Le monde n’est pas une malle à choses et à êtres, c’est un texte.
Regarder, c’est lire à voix basse.
Une âme sans doute se loge au creux de ce corps rustique et batailleur, pensait Femme ; un corps sûrement se cache derrière cette âme volubile et maquillée, se disait Homme.
Ainsi vont-ils, l’une et l’autre, finalement tourmentés par les mêmes inquiétudes métaphysiques, à peu de choses près, contrairement à ce que les théoriciens du choc des genres veulent nous faire accroire.
L’essentiel n’a jamais lieu que lié à un lieu.
Je suis allé chez un herboriste pour traiter mon insomnie. Son cocktail parfumé (aubépine, marjolaine et passiflore à laisser infuser dans un très grand bol) a été redoutablement efficace.
Toute la nuit, j’ai farouchement lutté contre une puissante envie de dormir afin d'aller faire pipi toutes les deux heures.
Fréquente l’improbable, séjourne dans l’infime et ris de toi à voix haute.
Septembrrre porte mal son nom.
(Version australe. Septembrrre porte bien son nom)
Il sera toujours temps d’espérer demain, aujourd’hui trace.
La direction de l’INSEE annonce avec regret le départ prématuré de la doyenne des Français, deux mois à peine après sa nomination ; la précédente n’avait guère tenu plus longtemps.
Je ne sais qui se charge du recrutement mais il devrait être plus regardant sur les motivations des candidats. Ce turn-over est du plus mauvais effet sur les jeunes, déjà touchés par la désinvolture et l'inconstance.
La mer, inlassablement, sans vocation pourtant, sans mission ni regret, seulement là, offerte à tous les jeux, à tous les drames, la mer, insaisissable et voyageuse, qui se prête, si l’on y tient, à toutes les nostalgies, les escapades, les illusions, sans insistance, sans espérance, aux noms multiples, la mer est là aussi, simple et fiable, qui ne juge pas, qui n’appelle pas, et n’élit pas, la mer, simple et fiable, comme un autre sol.
L’étonnement n’a rien de la surprise, il est une sensibilité à l’ordinaire.
Quand il ne trouve pas la réponse, l’homme de science écrit de la philosophie ; quand il est à court d’idée, le philosophe écrit de la poésie ; quand il n’a plus de papier, le poète jette des cailloux dans l’eau.
Voilà qui est bien rassurant en ces temps incertains.
Il l’ouvre,
le professeur :
« fermez-la ! ».
Séparer n’est pas dénouer ; lier n’est pas allier.
Il est des sourires qui ont la senteur épicée de l’imprévisible.
La crise n’épargne personne se lamentait un bout qui n’avait plus les moyens de joindre quiconque.
On n’écrit jamais sur une feuille blanche, et la lucidité devrait nous faire craindre davantage le copiage que le blocage.
− Le large (il appelle, convaincant, iodé, méditerranéen et bien charpenté) : Hé !
− La raison (d’une voix démonstrative, ferme, hyperboréenne et bien structurée) : Non !
− Les sirènes (elles chantent, inconséquentes, persuasives, postmodernes et sucrées) : Si !
− La raison (le même ton, sans appel) : N…
− La fin (elle les interrompt avec détermination, tout en cherchant vainement son mot) : Oh, la paix ! Voilà que ça recommence ; si vous continuez, j’arrête. Ça ne finira donc jamais cette minable petite guéguerre. Vous ne voudriez tout de même pas que l’on vous écrive une suite.
Un aller simple annonce souvent un retour compliqué.
Qu’importe les lendemains poisseux et les retours pluvieux, les horizons truqués, les rivages perdus, qu’importe les escales miteuses et les errances sans quête, qu’importe, les Indes appellent.
Dialoguer, c’est exposer l’étranger que l’on cache tous en soi et entendre le frère que tout étranger cache en lui.