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C'est Peu Dire

  • : Les Restes du Banquet
  • : LA PHRASE DU JOUR. Une "minime" quotidienne, modestement absurde, délibérément aléatoire, conceptuellement festive. Depuis octobre 2007
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Un Reste À Retrouver

19 octobre 2023 4 19 /10 /octobre /2023 02:37

Je voulais vous raconter l’histoire de Marcellin Dérouleau, mais, je ne sais pas. Lundi dernier, après un dimanche sans excès, Marcellin commença sa semaine par la visite de ses chantiers. Je veux dire, je ne sais pas si ça peut vous intéresser. Il y avait le terrain derrière la mairie qu’il fallait nettoyer. La vie ordinaire des gens ordinaires ne passionne pas ; ce n’est pas une critique, c’est ainsi, on demande à un livre ou un film d’enchanter le monde. C’était un chantier sans grandes difficultés ; il y avait seulement les trois vieux tilleuls à épargner, le Maire y tenait. Marcellin les avait marqués d’une croix blanche. Il faut des surprises, bonnes ou mauvaises ; il faut des drames lointains et des bonheurs proches. Il y avait ensuite l’immeuble de la rue Victor Hugo à “rafraîchir”. Rafraîchir, mon c., il fallait tout reprendre ; la colonne centrale avait été mal conçue et il fallait la consolider sans toucher à la façade qui était protégée. Le quotidien fournit rarement des éléments propres à nourrir une belle histoire ; puisque c’est bien cela qui est attendu. Son troisième chantier était une extension verticale des locaux administratifs de la C.A.F. Et qu’on soit bien d’accord, je ne blâme personne, je sais la fadeur des vies et je comprends le besoin d’évasion. Chantier sans intérêt, mais non sans problèmes qui avait été arrêté trois fois pour des raisons qui ne le concernaient pas mais l’affectaient pourtant directement. On attend légitimement d’une histoire qu’elle vous transporte ailleurs, loin, au pays de l’extraordinaire. Ce lundi donc qui attendait Marcellin serait une journée prévisible, une journée banale semblable à tant d’autres qui ne pouvait intéresser personne et que personne ne se risquerait à raconter. Marcellin ne traîna pas, car il avait rendez-vous avec son comptable à onze heures. Rien d’inquiétant, qu’on se rassure, c’était un rendez-vous ennuyeux certes, mais programmé et normal. Il serait malvenu de reprocher à Marcellin la monotonie de sa vie ; on ne nait pas héros et peu le devienne. Rien à attendre non plus de son comptable qui en quinze ans n’avait jamais raté un rendez-vous. Alors bien sûr, je vous entends et ne conteste pas, je pourrais lui inventer une vie de roman à Marcellin, puisque c’est un personnage de fiction. Marcellin n’était pas malheureux, c’était un bon entrepreneur, mais c’était une chance qu’il ne soit pas devenu personnage de roman, car il n’aurait pas trouvé les mots, il n’aurait pas su faire. À treize heures, il avait rendez-vous avec l’élu à l’urbanisme, il l’aimait bien, il viendrait avec son sandwich (rillettes-cornichons) et savait qu’ils finiraient, comme d’habitude, par parler de pêche. C’est vrai, j’aurais pu lui inventer une liaison extraconjugale, tiens avec l’élu par exemple. Mais non, impossible. Marcellin n’était pas homme à tromper Aline (son épouse) avec l’élu à l’urbanisme (Jean-Pierre Muhlo). Décidément, j’ai beau tourner la question dans tous les sens, raconter l’histoire de Marcellin serait une perte de temps, pour vous comme pour moi. Je préfère être honnête et cohérent.

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