La vie, avec ses oh ! et ses bah !
La vie, avec ses oh ! et ses bah !
– Dis donc, je vais faire une partie de pétanque, tu viens ?
– T’es vraiment méchante, Poule, pleurnicha Œuf.
– Allez, brûle la chandelle par les deux bouts, on n’a qu’une vie et elle est courte !
– Justement, c’est pour cela que je l’économise et en prends soin comme tout ce que j’aime.
Toute l’humanité tient là, entre ces deux options irréconciliables et tout aussi logiques.
La météo a ses tempéraments.
Il est des alizés réguliers, prévisibles, joueurs, toujours modérés, jamais fatigués, joyeux messagers. Il est des cyclones et des ouragans, violents, excessifs, incontrôlables, qui naissent du néant et y retournent heureusement.
– Bonjour tout le monde, lança Dieu !
– ?! et !?, firent Poule et Œuf.
– Euh, monsieur Dieu, vous avez dû vous tromper de dialogue, normalement c’est avec monsieur Monbonpierre que vous discutez, comme Soleil discute avec Terre. Ici, il n’y a que Poule et moi, Œuf. C’est déjà compliqué quand Panda passe, on ne comprend jamais ce qu’il veut dire. Alors, ce n’est pas contre vous, mais on risque d’être à l’étroit avec vous en plus.
– Bravo ! bonjour l’accueil, s’assombrit Dieu. Tout cela est trop cloisonné, on devrait faire preuve d’ouverture.
– Non, Œuf a raison pour une fois, renchérit Poule, en plus vous risquez de ne pas avoir de texte ; ici, l’auteur, il écrit pour nous.
– Attendez, votre dialogue d’hier sur les bas de contention, ça se voyait bien, c’était une improvisation, hein ? Personne ne croira qu’un auteur a écrit ça ! J’aimerais bien improviser aussi avec vous.
– Pardon, fit l’auteur ?
– Ben, c’est qui lui, s’étonnèrent en chœur Poule, Œuf et Dieu ?
– C’est l’auteur monsieur Dieu, tenta d’expliquer Panda. Vous devriez comprendre, vous, parce qu’un auteur, c’est comme un Dieu, c’est toujours là, même quand c’est pas là.
– ?!, !? et %§, firent Poule, Œuf et Dieu.
– Est-ce que quelqu’un a emprunté mes bas de contention, osa Œuf ?
– Il m’énerve, lui, s’énerva effectivement Poule. Tu sais qu’avec tes âneries, tu vas faire fondre notre lectorat ; il est même possible qu’OverBlog nous bloque le compte pour mise en danger de l’intelligence d’autrui.
– Ha ha ha, s’émerveilla Panda. Je vous adore, vous êtes mon couple préféré ; pas un jour sans que votre humour délicat, charpenté, coloré et toujours renouvelé me soulève, m’emporte et me ravisse.
– Bon ça va Panda, n’en rajoute pas, nuança Pangolin.
Depuis le 1er janvier, la touillette est interdite en France. Quel dommage !
Bien sûr l’objet va disparaître, et c’est bien, mais j’ai peur qu’il entraîne dans l’oubli le mot aussi, ce qui serait regrettable.
– Merci, vraiment, merci !
– Merci à vous, merci vraiment !
– Oui merci, vous avez été formidables !
– Oui, mais vous êtes extraordinaires, merci !
– Je voudrais remercier tous ceux qui m’ont remercié, je n’ai pas les mots…
– Euh, bonjour, c’est Œuf, est-ce que quelqu’un a vu ma brosse à dents électr…
– DEHORS !!!
– Est-ce que quelqu’un pourrait me prêter une clé de vidange Allen de 14 ?
– Mais qu’est-ce que tu nous emm... avec tes questions, Œuf, s’énerva Poule. Ce n’est pas parce que tu as un trait de dialogue que tu peux dire n’importe quoi quand l’auteur est fatigué ?
Il arrive que l’enthousiasme d’autrui fatigue, mais son indifférence, plus encore, accable.
Front sur le poing, patient
J’attends l’idée, qui traîne
La chasse d’eau du voisin me réveille
– Un bon roman qui me captive, et je m’évade.
Et si on commençait par un bon dictionnaire.
– Je me souviens encore de la première fois que je t’ai vue, lui lança-t-il, mélancolique et précis
– Je ne me souviens plus de la dernière fois que je ne t’ai pas vu, lui renvoya-t-elle, méchante et usée.
La littérature, cette imposture qui démasque les mensonges de la réalité.
Bien évidemment, ce n’était pas mieux avant, et il y a au moins autant de grands artistes, de génies et de héros aujourd’hui. Mais pourquoi braque-t-on les projecteurs, de nos jours, sur ce que l’on produit de plus futile, vil et malveillant ?
Kevin montre à Josiane, sa grand-mère, comment jouer à Mortal Kombat ; elle lui explique les règles de la crapette.
C’est évidemment simpliste, mais le choc des civilisations ne serait-il pas plutôt le choc des générations ?
Il y a une double difficulté avec la liberté d’expression. L’expression d’abord, que l’on confond avec l’émission de bruits : le monde n’a jamais été aussi bavard et criard. La liberté ensuite que l’on confond avec les caprices d’égos toujours-déjà offensés.
– Dis donc, tu ne trouves pas que c’était mieux avant ?
– Ça dépend dans quel sens tu tournes, répondit Yin à son frère Yang.
N’espère
N’attends
Fais
Trois choses à faire si vous voulez ne plus faire de listes numérotées de choses à faire.
1. Commencez par la deuxième chose à faire.
2. Lisez Tolstoï, jetez vos Perec et apprenez le chant.
3. Comptez exclusivement en binaire et saluez vos voisins.
4. Mangez moins de viande, garez vos pouces quand vous plantez des clous et adorez la pluie.
Écrire, non pour dire ce que l’on ressent, mais pour ressentir ce que l’on dit.
– Salut Poulette, dit Œuf, tu as vu mon nouveau tatouage ?
– Crétin, c’est un code pour le consommateur. Et arrête de m’appeler Poulette.
– Ah ? Je pensais que c’était la reproduction d’un Opalka, s’étonna Panda.
– !?
– ?!
Court éloge de l’aube
Ils disent l’aube est fade, elle a perdu la folie noire de la nuit.
Je dis elle est fade elle est belle, l’aube.
Ils disent l’aube est froide, il lui manque le feu du jour.
Je dis elle est froide elle est belle, l’aube.
– Est-ce que quelqu’un a vu mon couteau à huitres, demanda Œuf.
Ils sont rares ceux qui savent et aiment écouter. Parler est plus facile, tout le monde le sait bien.
Et logiquement, très rares aussi sont ceux qui savent et aiment lire. Écrire est plus facile.
Cela explique sans doute le brouhaha généralisé qui nous assomme aujourd’hui.